CERTIFIÉE HALAL

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Chez les Musulmans, le mot halal  désigne ce qui est permis par la loi islamique. Le terme est essentiellement employé pour ce qui est de la nourriture. Mais tous les actes de la vie sont en fait concernés. Dès lors, certaines habitudes sont déclarées halal. Quand elles ne le sont pas, elles sont haram. A cet égard le mode de vie de Kenza Boukamache, qu’incarne ici Hafsia Herzi, est carrément haram. Le film démarre quand sa famille réagit, la drogue et l’envoie inconsciente au bled pour la marier de force… 

Une façon sans doute expéditive et violente de régler les velléités d’indépendance du sexe faible. Mais tout cela est tempéré par le fait que le film est signé Mahmoud Zemmouri, qui a toujours choisi de rire et de faire rire de ce qui d’ordinaire nous consterne. Né en Algérie quand elle était française notre homme est, à l’instar de ses personnages, visiblement tiraillé entre deux cultures.  Signataire de sept longs métrages, il est également comptable d’une jolie carrière de comédien. Claude Berri, Yves Boisset, Jean-Loup Hubert, Gérard Jugnot ont ainsi eu recours à ses services. Et Steven Spielberg himself lui a trouvé un emploi dans Munich, son film sur les chaotiques Jeux Olympiques de 1972.

Certifiée halal a entre autres qualités celle de nous permettre de retrouver Hafsia Herzi. Elle a à peine dix-huit ans quand Abdellatif Kechiche lui propose d’être dans La Graine et le Mulet. Elle prend quinze kilos pour tenir le rôle. La scène de la danse orientale, son morceau de bravoure,  exige cinq jours de tournage. Une performance qui lui vaut de décrocher un prix d’interprétation  à Venise et le César du meilleur espoir féminin. Le début d’une très belle carrière, sous la direction d’Alain Guiraudie, Radu Mihaileanu, Bertrand Bonello ou Emmanuelle Bercot. Mais Mahmoud Zemmouri est sans doute le premier qui exploite son talent dans une comédie…

 
Dans le même genre vous pouvez trouver SALUT COUSIN (C'est une comédie dans le contexte des différences culturelles entre la France et l'Algérie) ou encore GARÇON D'HONNEUR (C'est une comédie où la tradition est confrontée à la vérité des sentiments).

Mahmoud Zemmouri n’est sans doute pas fréquemment cité parmi les cinéastes en vue du moment. Cela ne l’empêche pas d’avoir une œuvre. Soit sept films en tant que metteur en scène en l’espace de trente-cinq ans. Sept films qui peu ou prou labourent le même sillon, employant à chaque fois les armes de la comédie pour divertir tout en posant quelques questions chaudes. Son premier opus, en 1981, Prends 10000 balles et casse-toi, fait clairement allusion à la prime offerte aux immigrés, les incitant à quitter la France pour retourner sur les terres de leurs ancêtres. Un flop. La prime, pas le film. Ses œuvres suivantes, De Hollywood à Tamanrasset, L'Honneur de la tribu, 100% Arabica, Beur blanc rouge portent des titres sans équivoque. La question identitaire est bien au cœur de son œuvre, notre homme n’ayant de cesse d’interroger sa biculturalité. Un peu comme le fait en parallèle Merzak Allouache. Mais si celui-ci signe l’amusant Salut cousin, lui n’a pas toujours envie de rire : Le Repenti l’atteste.

Si Mahmoud Zemmouri cherche à stimuler nos zygomatiques, c’est sans doute parce que c’est sa nature. Mais peut-être juge-t-il qu’il n’est de meilleur moyen d’éveiller les consciences qu’en se montrant aimable. Certifiée halal est à cet égard exemplaire, qui dénonce sans la moindre ambiguïté le patriarcat dominant dans la société algérienne et la domination que les hommes entendent exercer sur leurs douces moitiés dès lors que le mariage est conclu. Le film croise ainsi le destin de deux femmes différentes, dont l’une ne veut pas renoncer à sa liberté quand l’autre s’éveille à une nouvelle vie. Le ton est léger, le film oscille entre le vaudeville et la pantalonnade, mais  il n’en est pas moins généreux.

Mais nous ne saurions nous quitter sans évoquer la personnalité de Smaïn Faïrouze, plus connu comme étant simplement Smaïn. Nous le retrouvons ici avec d’autant plus de plaisir qu’il se faisait rare, après avoir été une figure majeure des années 80 et 90. Mieux, le symbole d’une réussite exemplaire. Né en Algérie, de père et de mère inconnus, recueilli dans un orphelinat, adopté par un couple des plus modestes, Smaïn n’a dû son succès qu’à son opiniâtreté et son talent. La rencontre de Bouvard, celle du trio qui deviendra les Inconnus l’orientent vers la comédie. La scène et le cinéma l’accaparent, il se montre aussi à l’aise dans des one-man-shows toniques que dans des films où il donne la réplique aux plus grands. Mais les années 2000 le voient peu à peu s’effacer, comme s’il laissait la place à ses cadets, Djamel Debbouze en tête.Avant un retour progressif sur le devant de la scène, tant au cinéma que dans des séries télé.