DOCTEUR FOLAMOUR

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Dr Folamour est un cas quasi-unique dans l'oeuvre de Stanley Kubrick : sa seule comédie. Noire et décapante certes, mais d'une inattendue loufoquerie dans la carrière du réalisateur de 2001, odyssée de l'espace ou Barry Lyndon. Il faut peut-être aussi y voir un air du temps : lorsque Kubrick veut se lancer dans le récit d'une tentative d'attaque nucléaire de l'URSS, lancée par un général américain, le monde est en pleine guerre froide, terrorisé par la peur du péril atomique.
A l'époque le sujet est sérieux. D'ailleurs, Kubrick voulait initialement rester sur cette ligne, en se basant à la fois sur le très sérieux roman Red Alert et sur une étude d'un prix Nobel d'économie. Le principe d'une comédie lui apparut pendant l'écriture du scénario, estimant que s'il s'en tenait à une description clinique de faits menant à une potentielle apocalypse, la dénonciation de l'absurdité et des paradoxes de ce qui aurait mené à une telle situation serait passée à l'arrière-plan.

L'ultime trait d'humour de Dr Folamour n'est pourtant pas à l'écran : pour accompagner sa sortie, Peter George, l'auteur de Red Alert qui avait collaboré au scénario, fit paraître sa novelisation, basée sur un des premiers jets, où des extraterrestres débarquant sur une Terre dévastée, finissaient par découvrir le film, qui leur permettait de comprendre comment l'humanité s'était stupidement autodétruite.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver TREIZE JOURS (Treize jours revient sur la situation tendue à la Maison Blanche, lors de la crise des missiles de Cuba en octobre 62.) ou encore POINT LIMITE (En 1964, Sidney Lumet filme des échanges entre les dirigeants des USA et de l'URSS dans le même climat de tension et de guerre froide que Dr Folamour.).

Le projet de Dr Folamour intrigua beaucoup de studios hollywoodiens, mais peu voulurent se risquer à le produire. Columbia finit par négocier un accord avec Kubrick: un financement contre la garantie que Peter Sellers soit la vedette du film, mieux qu'il y tienne plusieurs rôles. Pourquoi ? Parce qu'un des décideurs s'était mis en tête qu'il y avait de quoi se couvrir en reprenant l'un des acteurs de Lolita, énorme succès de Kubrick, et en capitalisant sur sa performance dans La souris qui rugissait, autre triomphe public - où il jouait trois personnages.
Sellers ne remplit pas tout à fait son contrat, puisqu'il aurait du initialement incarner quatre personnages dans Dr Folamour. A la suite d'un accident à la hanche ne lui permettant plus de tourner dans le décor étroit d'un cockpit, Kubrick et son co-scénariste Terry Southern, proposèrent le rôle du Major T.J Kong à John Wayne. Fidèle à son image de symbole d'une Amérique cocardière, ce dernier refusa. Southern et Kubrick se retournèrent alors vers Slim Pickens, second rôle dans de nombreux films de guerre, mais sans jamais lui dire qu'il s'agissait d'une comédie ou en ne lui fournissant que les pages du scénario concernant ses scènes, pour qu'il joue le plus sérieusement du monde le pilote du B 52 larguant ses bombes.
Le Dr Folamour n'existait pas, lui, dans le roman originel. Il fut inspiré à la fois de John Von Neumann, le mathématicien ayant travaillé sur l'élaboration des premières bombes atomiques, Edward Teller le créateur des bombes à hydrogène et de Werner Von Braun, le scientifique qui développa pour le régime Nazi un programme spatial. Une insistante légende urbaine voulut que Folamour était surtout un portrait satirique d'Henry Kissinger, l'un des maitres américains de la realpolitik. Chose impossible puisque les talents de ce dernier ne furent connus que lorsqu'il fut conseiller présidentiel de Nixon et Ford, à la fin des années soixante, soit longtemps après la sortie de Dr Folamour. Comme si le sens de l'absurdité voulu par Kubrick s'était propagé en dehors de son film...

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La filmographie de Stanley Kubrick a ceci de particulier c'est que sans être très longue, elle est l'une des plus variées du cinéma américain. En quelques films seulement le bonhomme a su aborder tous les genres ou presque. Quand il réalise Docteur Folamour, il a déjà ...