EMA

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Depuis 2006, Pablo Larrain s’est fait une spécialité de l’observation de son Chili natal avec des films comme Fuga, Tony Manero, Santiago 73, No, El Club et Neruda. En 2016, Jackie, avec Natalie Portman dans le rôle-titre, détonne dans sa filmographie en brossant un portrait de Jackie Kennedy. Ema lui permet de revenir au Chili pour une œuvre atypique qui flirte avec le cinéma expérimental autour de la renaissance d’une jeune danseuse résolue à changer de vie après une adoption qui a mal tourné.

L’adoption a été le thème de nombreux film français. En 2019, Pupille de Jeanne Herry a évoqué la procédure telle qu’elle se déroule en France. Bertrand Tavernier a suivi le parcours du combattant de parents voulant adopter au Cambodge dans Holy Lola. Valérie Lemercier a traité le sujet avec humour dans 100% Cachemire tout comme Lucien Jean-Baptiste dans Il a déjà tes yeux où des parents noirs adoptent un enfant blanc.

Marianna Di Girolamo trouve son premier grand rôle dans Ema. Après des études de théâtre à l’Université catholique du Chili, elle est apparue dans la série Pituca sin Lunas en 2004 et s’est illustrée sur scène en 2015 dans La Tempête de Shakespeare mis en scène par Juan Radrigan. Gael Garcia Bernal retrouve quand à lui Pablo Larrain qui l’avait dirigé en publicitaire opposé au général Pinochet dans No (2012) et en policier chargé d’arrêter le poète en cavale dans Neruda (2016). Santiago Cabrera mène une carrière internationale prolifique notamment à la télévision. On l’a vu notamment  dans le rôle d’Aramis dans la série The Musketeers, dans celui de Lancelot dans la série Merlin et de Chris Rios dans la série Picard.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver SUSPIRIA (Parce que ce remake du film de Dario Arento signé par Luca Guadagnino utilise aussi des chorégraphies perturbantes pour exprimer la violence et la sensualité de ses personnages.) ou encore PUPILLE (Parce que ce film parle aussi d'adoption en montrant comment le processus se déroule en France.).

C’est le thème de l’adoption et plus particulièrement de l’adoption ratée qui a motivé Pablo Larrain pour écrire Ema. Selon lui, l’adoption est un acte généreux mais souvent idéalisé par les futurs parents ce qui peut causer de sévères désillusions. Parfois, les enfant sont si sévèrement traumatisés que cela provoque des drames dans leur nouvelle famille qui les « rend » à l’orphelinat. Le parcours de ces bambins changeant de nom et de famille au gré de la bureaucratie l’a fasciné. Après avoir envisagé de centrer son récit sur une héroïne plus âgée, il  a construit le personnage principal avec l’aide de l’actrice Marianna Di Girolamo. Il a souhaité que la jeune femme participe au processus créatif de façon à celle qu’elle apporte l’expérience de sa génération à l’écriture. Pablo Larrain tenait à ce qu’elle donne sa vision notamment sur le consumérisme et la sexualité.

Le reggaeton, reggae espagnol qui a vu le jour au milieu des années 2000, tire ses influences du hip-hop et du « dance-hall » jamaïcain. Il occupe une place capitale dans le film comme dans la vie de l’héroïne. Pablo Larrain explique que cette musique est parfois mal considérée car elle peut être perçue comme misogyne en raison de la représentation des femmes et de leur corps qu’elle propose. Il s’est intéressé à la réponse d’une femme sur le sujet. Dans le film, elle déclare que personne ne doit lui dicter sur quoi danser et qu’elle a l’impression  de coucher avec ses partenaires sans les toucher grâce à la musique. Cette conception moderne de la danse témoigne de l’âge du chorégraphe incarné par Gael Garcia Bernal que les danseurs plus jeunes trouvent vieux jeu dans sa façon de travailler.

Pablo Larrain estime que Mariana Di Girolamo peut exprimer la force tout autant d’une extrême fragilité. Il explique qu’il a abordé son personnage comme certaines danses démodées où on commence par évoluer loin de son partenaire pour s’en rapprocher progressivement. Il a pensé à Théorème de Pier Paolo Pasolini en créant cette héroïne dont la présence fait évoluer les gens qui la rencontrent.  Pour lui, elle représente Mère Nature en étant à la fois mère, sœur, fille, amante et danseuse. Il estime qu’elle est aussi aussi un soleil autour duquel tournent tous les personnages.

Après le miraculeux biopic qu’était Jackie, Pablo Larrain revient avec Ema, une oeuvre difficile à empoigner mais dont la vitalité et la force de fascination l’emportent sur tout le reste. Après Madre ou même Eva en Aout, c’est un autre portrait de femme qui enflamme ...

EMA (Pablo Larrain, CHI, 2020, 102min) : À la faveur des derniers feux de l'été EMA déboule de manière incandescente sur l'écrin de nos rétines, pour enflammer nos sens à la faveur d'une expérience cinématographique singulière et hypnotique. Présenté l'été dernier ...

Le nouveau film de Pablo Larrain s’ouvre sur un superbe plan : un feu de signalisation flambe dans la nuit. La perfection chromatique de la photographie (les lumières électriques de la cité, l’orangé vorace du brasier) accompagnée par la musique dense de Nicolas Jaar impose ...