EPOUSES ET CONCUBINES

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Adapté d’un roman de l’auteur chinois Su Tong, de son vrai nom Tong Zhonggui, Epouses et concubines raconte l’histoire de Songlian, une jeune fille chinoise de dix neuf ans instruite mais pauvre, qui deviendra la quatrième épouse de maître Chen, un homme très riche. Initiée aux rites du clan qu’elle vient d’intégrer, Songlian y découvrira un univers de mesquineries, de délations et d’intrigues pratiquées par les femmes dans le seul but de s’attirer les faveurs du maître. D’abord réticente, la nouvelle venue finira par jouer le jeu jusqu’à y supplanter ses rivales, mais non sans risques.

Le réalisateur Zhang Yimou à qui l’on doit entre autres Qiu Ju, une femme chinoise,  déroule l’action de son film qui se situe dans la Chine des années vingt, en huis clos, ceci pour appuyer le rôle joué dans l’histoire par le poids des traditions. Les lanternes rouges allumées chez celle que le maître aura choisi pour passer la nuit en sa compagnie en sont un exemple, tout comme le droit gagné par la favorite d’un soir, de régner le lendemain, sans partage, sur les domestiques. D’ailleurs le titre international du film est Raise the red lantern, soit Hissez la lanterne rouge.

Pour interpréter Songlian, Zhang Yimou a choisi comme souvent dans ses films, son épouse d’alors, l’actrice Gong Li. Celle-ci s’émancipera plus tard à Hollywood en tournant notamment Miami vice, deux flics à Miami, et sur le plan personnel se remariera avec un riche industriel de Singapour allant jusqu’à se désister de sa nationalité chinoise en faveur de celle de son nouvel époux.

Epouses et concubines reçut le Lion d’argent à la Mostra de Venise en 1991.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver KAGEMUSHA (Ce film d'Akira Kurosawa est également un drame historique.) ou encore ALICE (Ce film de Woody Allen a pour vedette féminine Mia Farrow qui fut sa compagne et qu'il fit tourner dans bon nombre de ses films, tout comme Zhang Yimou avec Gong Li.).

Contraint à l’âge de quinze ans, en 1966, à cause de la révolution culturelle, d’arrêter ses études, Zhang Yimou travaille alors dans une ferme pendant trois ans, et puis dans un atelier de tissage pour les sept années qui vont suivre. Ces activités ne l’empêchent cependant pas de se livrer en amateur, à la peinture ainsi qu’à la photographie, avant de s’inscrire à l’Université de cinéma de Pékin dans la section « prises de vue ». Il y développera un goût certain pour le maniement des couleurs qu’il sera aisé de repérer dans ses différents films, dont celui auquel vous venez d’assister. Vous aurez sans doute remarqué le rôle prépondérant du rouge dans l’élaboration des ambiances propices au déroulement de l’intrigue.

Mais ce n’est pas en tant que directeur de la photographie que Zhang Yimou s’installera dans le cinéma chinois, et bien qu’ayant exercé la fonction de chef opérateur dans deux films du cinéaste Chen Kaige, il y préfèrera la réalisation. Avec raison puisque dès son premier film en 1988, Le Sorgho rouge, et oui encore le rouge, il remportait l’Ours d’or au Festival de Berlin.

Très vite, Zhang Yimou fut considéré comme l’un des chefs de file du nouveau cinéma chinois, faisant partie de ce que l’on appelle la « cinquième génération »,  désignant par là les cinéastes chinois ayant étudié après la révolution culturelle et clairement influencés par la Nouvelle Vague française. Revendiquant une liberté de ton rarement vue auparavant dans le cinéma chinois, Zhang Yimou et ses pairs de ladite génération, eurent à plusieurs reprises maille à partir avec la censure. Il va d’ailleurs sans dire que l’aliénation des femmes décrite dans Epouses et concubines n’est pas sans rappeler le diktat du Parti dans la Chine des années quatre vingt dix. Et si le maître Chen en impose autant bien que filmé essentiellement de dos, c’est bien parce qu’il représente une autorité suprême dans laquelle il est facile de reconnaître un pouvoir politique. 

Sachez enfin que l’actrice He Caifei qui interprète le rôle de Meishan, la troisième épouse, figurera plus tard au générique de Lust, caution du taïwanais Ang Lee. Film qui reçut le Lion d’or à la Mostra de Venise en 2007.