HASARDS OU COÏNCIDENCES

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On ne peut pas sans raison fonder sa société un vendredi 13 et lui donner le nom des Films 13... Fasciné par les signes du destin, Claude Lelouch se devait absolument d’aborder un jour ou l’autre les hasards et les coincidences de la vie.

C’est chose faite en 1997 dans le film que vous allez découvrir. Mais n’attendez pas une comédie agréable et légère comme l’auteur de L’aventure c’est l’aventure ou La bonne année sait si bien en faire. Non, il s’agit ici d’explorer le côté sombre de l’existence, quand quelqu’un, quelque part, vous reprend tout ce qu’il vous a donné et que vous pensiez être acquis pour toujours. Myriam, (Alessandra Martines), est une danseuse étoile, amoureuse éperdue de Pierre, (Pierre Arditi), un commissaire-priseur, avec qui elle a un enfant. Bonheur parfait... sauf qu’une promenade en mer va transformer le conte de fée en tragédie.

Quand on a tout perdu, qu’est-ce qui vous pousse à continuer, à repartir de l’avant ? Peut-on encore être heureux quand on a vécu pareille tragédie ? Lelouch répond à ces questions existentielles avec la tendresse, les ellipses et la poésie d’un vieux sage...

 
Dans le même genre vous pouvez trouver UN LONG DIMANCHE DE FIANÇAILLES (S'obstiner malgré tout, même quand tout le monde vous dit qu'il n'y a plus de raison d'espérer. S'obstiner jusqu'à traverser le monde pour rechercher l'autre...) ou encore AU NOM DE TOUS LES MIENS (De quelle façon les drames le plus terribles nous construisent-ils et nous permettent-ils de revivre à nouveau un grand amour ou une vie heureuse ? Robert Enrico et Claude Lelouch posent cette double question.).

Dans sa longue carrière, Claude Lelouch a connu des fortunes diverses. Comme le bateau mortel de ce film, il a navigué sur la vague du triomphe avec Un homme et une femme, Les uns et les autres ou Itinéraire d’un enfant gâté mais aussi sombré au creux d’échecs terribles. Hasards ou coïncidences entre malheureusement dans cette seconde catégorie.

Le public ne l’a pas suivi dans la descente aux enfers puis la renaissance de son héroine. Injuste sans doute mais normal aussi : l’idée qu’il faut souffrir pour mieux vivre ensuite est au mieux dérangeante au pire insupportable. La musique de Francis Lai ou de Claude Bolling n’y peut rien et n’adoucit pas les moeurs torturées de Lelouch ! Profondément blessé par le rejet public, le réalisateur s’est alors promis de quitter la France, pour se tourner vers d’autres horizons, là ou Hasards ou coïncidences avait été chaleureusement accueilli. C’est notamment le cas aux Etats-Unis où Alessandra Martines a reçu le prix de la meilleure comédienne au festival de San Francisco. Mais Lelouch reste Lelouch : écorché vif, fier et toujours avec un projet d’avance. Cette brouille avec le grand public ne l’a pas tenu éloigné très longtemps des plateaux français. N’est-ce pas lui qui tourna le film Partir revenir ? Remis en selle, le cinéaste a enchaîné avec d’autres projets qui, à leur tour, ont connu des fortunes diverses.

Demi-succès ou quasi échecs, des films comme Romans de gare ou Ces amours-là revisitent et réinventent un style parfois répétitif mais toujours moderne et généreux. Claude Lelouch est même allé jusqu’à hypothéquer les négatifs de ses œuvres ou offrir une séance gratuite aux spectateurs pour convaincre le public de découvrir son travail ! Pièce maîtresse des millésimes Lelouch des années 2000, le documentaire D’un film à l’autre, formidable catalogue des aléas d’une vie. Hasards ou coincidences, ces accidents de parcours n’ont pas entamé l’enthousiasme de cet éternel gamin et même achevé de le convaincre que son destin était de Vivre pour vivre, derrière une caméra...