L'AVOCAT

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Cédric Anger aime les ambiances sombres. Ce scénariste reconnu, notamment pour son travail auprès de Xavier Beauvois sur Le petit lieutenant, aborde avec L'avocat un genre très particulier, à mi-chemin entre le polar et la chronique judiciaire. Déjà dans son premier film, Le tueur en 2008, le cinéaste centrait son action sur l'univers du crime. Point commun entre les deux films, Gilbert Melki. Dans L'avocat, il joue Paul Vanoni, épouvantable parrain de la région de Montpellier, qui règne sur la pègre locale et qui va engager Léo, jeune avocat prometteur pour régler ses différents problèmes judiciaires. Léo, c'est Benoît Magimel, ambitieux, fonceur mais vite rattrapé par la spirale de danger qui entoure son terrible client.

La vraie force du film, c'est l'opposition entre les natures des deux personnages principaux : la fureur solaire de Vanoni et le calme minéral de Léo. Hasard ou pas justement, Cédric Anger a confié ces rôles à deux comédiens dont les styles de jeu sont également très éloignés : quand Magimel aime l'introspection, Melki se laisse aller à des improvisations exubérantes. L'idée sur L'Avocat était de respecter le scénario bien sûr, mais surtout de ne pas se fier au texte à la virgule près, pour que l'histoire vive le mieux et le plus longtemps possible.

Le résultat vous allez le voir est à la fois glaçant et impressionnant.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LA FIRME ("La firme" est signé Sydney Pollack en 1993 avec Tom Cruise et Gene Hackman. C'est l'adaptation d'un roman du spécialiste du thriller, John Grisham. Comme dans "L'avocat", on y assiste à la lente descente aux enfers d'un jeune et brillant diplômé de droit qui intègre une entreprise mafieuse.) ou encore L'AVOCAT DE LA TERREUR (Ce documentaire de Barbet Schroeder s'intéresse à la carrière de Jacques Vergès. Cet avocat spécialisé dans les dossiers hors-normes, (Klaus Barbie, Carlos, Omar Raddad...)y parle de sa passion pour les dossiers réputés impossibles et révèle au passage sa fascination pour le mal et ceux qui l'incarnent.).

Benoît Magimel, découvert adeolescent dans La vie est un long fleuve tranquille puis révélé en jeune premier dans Les chevaliers du ciel ou Les rivières pourpres 2, s'affirme ici dans un registre plus grave qui lui va bien, à l'image de celui cultivé dans Les petits mouchoirs de Guillaume Canet. Acteur appliqué, Magimel a voulu peaufiner son rôle, en s'immergeant à l'américaine au sein du Tribunal de Grande Instance de Paris, assistant à plusieurs plaidoiries auprès de ténors du barreau.

A l'inverse, Gilbert Melki s'est lui inspiré de truands qu'il a pu côtoyer dans le Midi, ou dont on lui a conté les "exploits". Son interprétation est dans la ligne droite des personnages hauts en couleur de La vérité si je mens ou Palais Royal. Mention spéciale aussi à Eric Caravaca en policier obstiné et à Aïssa Maïga en compagne de Léo qui apportent une touche de douceur dans ce monde de brutes.

L'Avocat renouvelle un genre peu pratiqué en France. Les Américains, eux, ont maintes fois abordé le thriller pénal, avec La firme, Michael Clayton ou même L'Avocat du diable. Chez nous, c'est plus souvent par le documentaire que ce domaine est traité sur grand écran avec par exemple L'Avocat de la terreur, centré sur la carrière de Jacques Vergès, film signé Barbet Schroeder. Lequel Barbet Schroeder est d'ailleurs, vous l'avez aperçu, au générique de L'Avocat pour une participation qui le fait retrouver Benoît Magimel, héros de son film, Inju, la bête dans l'ombre.

Malgré toutes ses qualités, le film de Cédric Anger n'a pas réussi à séduire le grand public, décidément frileux envers ce genre là : avec 70 000 entrées, le résultat est loin des objectifs de départ mais il fait partie de ces oeuvres qui mûrissent avec le temps et par l'intemporalité de son sujet, il restera actuel pour longtemps.