LES NOCES FUNÈBRES

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"C'est l'histoire d'un type qui épouse une morte" a annoncé Tim Burton en préambule à son coscénariste John August. Forêt sous la lune où une racine s'avère être la main d'une macchabée, demeure victorienne qui ressemble à un mausolée, délicieuse fiancée truffée d'asticots et royaumes des morts où la fête bat son plein : oui, Les Noces funèbres sont gothiques à souhait, le pur romantisme y côtoie l'humour noir, et l'au-delà y est bien plus marrant que le monde puritain et rigide des vivants, inspiré de la société victorienne. 
Dix ans : c'est le temps qu'il a fallu à Tim Burton pour concrétiser cette merveille d'animation car il attendait de pouvoir réunir les "bonnes personnes". Comme coréalisateur, il a choisi Mike Johnson, l'un des derniers de la nouvelle génération d'animateurs à préférer le procédé image par image et des marionnettes sculptées avec une précision d'orfèvre et manipulées millimètre par millimètre. Pas d'ordinateurs ou presque mais de la patience, beaucoup de patience car le film a nécessité un tournage de 14 semaines et autant de montage.

Parmi les 85 personnages, les rôles principaux sont interprétés par la fine fleur du cinéma américain et britannique. Johnny Depp, acteur fétiche de Burton, prête sa voix à Victor. Helena Bonham Carter, compagne du cinéaste, parle pour la fiancée morte. Emily Watson, inoubliable dans Breaking the Waves de Lars von Trier est Victoria, l'amoureuse vivante de Victor. Le pasteur est interprété par Christopher Lee qui jouait déjà le père dentiste de Willy Wonka dans Charlie et la chocolaterie. Et qui donne une voix si pincée à la mère de Victoria ? C'est Joanna Lumley, la Purdey de la deuxième série de Chapeau et bottes de cuir, reconvertie dans Absolutely Fabulous... So british...

 
Dans le même genre vous pouvez trouver L'ETRANGE NOËL DE MONSIEUR JACK ou encore LA FAMILLE ADDAMS DE BARRY SONNENFELD .

Gothique, entièrement réalisé avec des marionnettes à l'ère du numérique, réconciliant la vie et la mort, Les Noces funèbres sont du Tim Burton pur jus à des encâblées de l'univers Disney. C'est pourtant dans les studios Disney que le cinéaste débuta en 1979 en travaillant sur Rox et Rouky. Il y restera trois ans, incompris, se repliant dans un comportement quasi autiste, se sentant "une princesse prisonnière" chez Disney. Comment, en effet, s'épanouir au milieu des petits lapins et des renards quand, depuis l'enfance, on est amateur de films d'épouvante et grand admirateur de Ray Harryhausen, roi des trucages qui avait donné vie à des squelettes dans Jason et les argonautes.

Quand il était jeune, alors que ses copains s'identifiaient plutôt à Gary Cooper, Tim, lui, préférait Lon Chaney ou Boris Karloff avec leurs visages grimés et masqués. Mais son idole absolue est l'acteur de cinéma fantastique Vincent Price, interprète des six adaptations d'Edgar Poe réalisées par Roger Corman au début des années 60 comme La chambre des tortures. En 1990, Tim Burton réalisa son rêve : diriger Vincent Price qui joua pour lui le créateur d'Edward dans Edward aux mains d'argent. Ce fut le dernier rôle de l'acteur qui mourut trois ans plus tard.

Burton a toujours été fasciné par les monstres de série B. Loin d'être terrifié, il les a toujours perçus comme des êtres incompris, plus sensibles que les personnages normaux. Une vision que l'on retrouve intacte dans L'Etrange Noël de Monsieur Jack, Les Noces funèbres, Sleepy Hollow, Le Cavalier sans tête et même Batman où les méchants sont attachants et où le super héros est un être névrosé, traumatisé par la mort de ses parents.

Chez Burton, la mort est un leitmotiv: ainsi Beetlejuice, sa comédie macabre, débute par le décès d'un couple dans un accident de voiture. Et on ne parle pas de Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street où les victimes du barbier finissent hachés dans des petits pâtés...