TESS

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Préjugés de classe, chemins creux de la campagne anglaise, révélation sur une identité sociale, force tragique d'un destin : Tess de Roman Polanski est à la fois une somptueuse grosse production et un grand film intimiste. C’est Sharon Tate qui fit lire le classique de Thomas Hardy à son mari, Roman Polanski. Dix ans après son odieux assassinat par les disciples de Charles Manson, le cinéaste lui dédiait cette illustration naturaliste et funeste du destin d’une jeune beauté dans le Dorset du XIXe siècle.

Ce qui frappe avant tout, c'est la splendeur formelle du film, sa lumière et le travail impressionnant de reconstitution. Pendant des mois, l’équipe de Polanski créa les costumes, retrouva du mobilier d’époque, réinventa le Dorset sur les côtes bretonnes et normandes. Pour coller encore plus à la campagne anglaise, des centaines d’arbres furent replantés et l’asphalte fut recouvert de terre. C'est justement la perfection languide des décors naturels, sa distinction de gravure anglaise où chaque bouton de rose est éclatant qui finit par engendrer le malaise. Pour Tess, qui ne trouvera jamais sa place ni son repos, chaque ciel orageux, chaque lande déserte apparaît comme un tombeau naturel.

Rarement on a vu plus beau portrait d'une jeune fille sacrifiée sur l'autel de la misogynie. Nastassja Kinski, belle à tomber, porte le film sur ses frêles épaules d'actrice de 17 ans et son interprétation est remarquable d'instinct et de sensibilité. En elle, Polanski a vraiment trouvé l’incarnation idéale de ce jeune fruit piétiné par les orgueils et les préjugés.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver OLIVER TWIST DE ROMAN POLANSKI (Encore un jeune être humilié (et un héros de la littérature) magnifiquement filmé par Polanski dans l'Angleterre victorienne. Rarement l'ironie de Dickens fut aussi bien captée.) ou encore BRIGHT STAR DE JANE CAMPION (La campagne de l'Angleterre victorienne, une nature éclatante, un écrin somptueux pour l'idylle passionnée du poète John Keats et de sa voisine Fanny Brawne. Magnifique.).

En 1969, donc, Sharon Tate, la jeune épouse de Roman Polanski, découvre Tess d'Urberville, grand classique de la littérature anglaise signé Thomas Hardy. Et elle est enthousiasmée par ce personnage féminin. Au mois d'août 69, elle quitte leur appartement londonien pour partir accoucher à Los Angeles et elle laisse le roman à Roman. Quelques jours plus tard, elle est assassinée.

Une décennie plus tard, Tess sera, pour Polanski, un film cathartique, alors qu'il vient de fuir Hollywood (où il a réalisé Rosemary's Baby et Chinatown) à cause d'une histoire de moeurs - cette même histoire qui refera surface bien des années plus tard. Le producteur Claude Berri l'accueille à bras ouverts à Paris : il a envie de le produire quelque soit son projet. Au début du tournage, le 31 juillet 1978, aucun accord de coproduction n'a encore été signé avec les Américains. Aucun accord ne sera signé et Claude Berri sera obligé d'hypothéquer ses biens. Tess est alors le film le plus cher jamais réalisé en France et ce sera aussi le tournage le plus long, 8 mois, cumulant le plus de décors extérieurs.

Derrière la reconstitution historique, Tess est ancré dans la fin des années 1970 qui voient la fin de la révolution ouvrière, la dérégulation libérale inaugurée par Margaret Thatcher. L’hymne à la nature est aussi une réponse aux catastrophes environnementales de l'époque. Si le tournage fut une fête, le montage, en revanche, fut une période noire de presque deux ans où Polanski et Berri se déchirèrent sur la longueur du film. La première version faisait plus de trois heures et Polanski ne voulait pas en démordre. Au final, le film fut un succès et remporta un grand nombre de prix dont le CESAR du meilleur film et du meilleur réalisateur. Sharon pouvait être fière de Roman... 

Quand Roman Polanski décide de tourner cette adaptation du classique de Thomas Hardy, il cherche à rendre hommage à sa femme, Sharon Tate, qui souhaitait incarner l'héroïne. C'est elle qui lui a mis le matériau original entre les mains. C'est grâce à elle qu'il est entré ...

On dit souvent qu'un artiste n'est jamais meilleur que quand il est dans la tourmente. On serait tenté de donner raison à cette maxime à la vision de cette adaptation du roman de Thomas Hardy, tournée par un Polanski alors accusé de viol sur mineur et menacé d'extradition. ...

Beau et lent. L’idée d’adapter le roman de Thomas Hardy aurait été suggérée à Polanski par Sharon Tate à qui le film est dédié. Une des difficultés pour la critique est précisément de déterminer quelle est la part de Roman Polanski dans la réussite du film, ...