THE CARD COUNTER

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Il n’est pas nécessaire d’être joueur de poker ou de blackjack pour apprécier ce “Conteur de cartes.” Mais les habitués y trouveront malgré tout leur compte. Pour autant, qu'il soit dit que la passion du jeu n’est pas au cœur de l’intrigue, bien qu’elle se déroule souvent à travers les allées mornes des petits casinos américains.  

The Card Counter c’est William Tell, qui en dépit de son patronyme n’est pas une flèche côté joie de vivre. Cela dit, il a des circonstances atténuantes, notre ancien militaire au passé trouble, devenu un accro au poker. Sur son chemin, il tombe sur un jeune type inquiet, vulnérable et animé d’une envie de vengeance contre John Gordo, un colonel de l'armée avec qui Tell a eu maille à partir… 

Le nom du réalisateur de The Card Counter est en soi un gage : Paul Schrader. L’auteur de Taxi Driver, de Raging Bull, etc., etc. Comme réalisateur, son nom est également associé à quelques beaux succès comme American Gigolo, Blue Collar - son premier film derrière une caméra - ou encore La Féline. Mais avec The Card Counter, Paul Schrader place la barre beaucoup plus haut, en termes d'intentions et de sous-texte. Bonne projection.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver ARNAQUES, CRIME ET BOTANIQUE (1998) (Où Guy Ritchie, cartes en main, réalise un film prenant sur la folie des cartes.) ou encore LE KID DE CINCINNATI (1965) (La référence absolue en matière de film de poker !).

The Card Counter - dont Martin Scorsese est le producteur exécutif - est de ces films qui contribuent à étoffer une œuvre. Celui de Paul Schrader fait ainsi écho à nombre de ses films postérieurs, que ce soit comme simple auteur, ou comme réalisateur : William Tell, Le compteur de cartes est dans une logique de culpabilité ; pèse sur lui une responsabilité morale ; qui le conduit à réfléchir à sa rédemption. Ce qui le rapproche intimement des personnages principaux de Taxi Driver - Travis Bickle - d’American Gigolo - Julian Kaye - ou encore de Sur le chemin de la rédemption - Ernst Toller.  L’intéressé l’explique autrement : “Au fil des années, j’ai mis au point mon propre genre cinématographique. En général, mes films parlent d’un type, seul dans une pièce, qui porte un masque - et ce masque désigne sa profession”. William Tell arbore celui d’un joueur de poker professionnel qui, autrefois, a été tortionnaire pour le gouvernement américain.”  

Le film fonctionne au départ sur le rythme posé mais infaillible auquel Schrader déshabille son personnage devant nos yeux, pour nous donner à voir ses failles et ses aspérités, tandis que celui-cil erre dans les couloirs d’un casino, qui ressemble à l'idée qu'il se fait de son purgatoire. «J’avais envie de m’intéresser à un personnage qui a commis un acte qu’il ne peut se pardonner. Il a fait de la prison. La société lui a sans doute pardonné, mais pas lui. Il a fait quelque chose de terrible dont tout le monde pâtit. C’est alors que j’ai pensé aux tortures pratiquées dans la prison d’Abou Ghraib en 2003, une forme de crime qui a non seulement fait du mal aux prisonniers arabes et à leurs tortionnaires américains, mais à tout le pays ; et à la culture militaire qui l’a favorisé ».

Compter les cartes, sans chercher à les abattre pour abattre son adversaire, cela revient à égrener les minutes qui vous séparent de la fin de la partie, de ce moment tant attendu où l’on peut se retirer sur un all-in et se débarrasser enfin de ces jetons entassés comme ...

On reconnaît aisément le personnage de Paul Schrader, que ce soit dans son cinéma ou les films qu’il écrit pour les autres : un homme torturé, profondément abîmé par l’existence, tentant de survivre à travers une activité alors que les démons menacent à tout moment ...

Atlantic City, l'Ohio, Las Vegas... Paul Schrader nous emmène dans l'Amérique du jeu et des casinos, celles de l'apparence, des lumières et des paillettes, pour y suivre un personnage pourtant mutique et discret. The Card Counter prend son temps pour mettre en place ses personnages ...