A LA BELLE ÉTOILE

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La littérature n’a pas attendu Flaubert pour placer l’éducation sentimentale au cœur des préoccupations des romanciers. Et le cinéma n’a jamais été en reste pour mettre en lumière les premiers émois amoureux. Tant et si bien qu’il n’est aujourd’hui pas facile de faire preuve d’originalité lorsque l’on veut décrire les troubles adolescents.

La tendresse que nous éprouvons pour A la belle étoile n’en est que plus grande, le film ayant incontestablement un ton personnel. Une part importante de l’identité du film tient à la personnalité de Mathieu Demy, qui avait alors 21 ans mais campait un lycéen des plus crédibles. Le fils de Jacques Demy et Agnès Varda avait débuté sa carrière d’acteur dans l’un des films de sa mère, L’une chante, l’autre pas, à l’âge de cinq ans. C’est ce qu’on appelle être un enfant de la balle. Mais il n’est pas seul à l’être.

Sa meilleure amie est incarnée dans le film par Chiara Mastroianni, qui est comme chacun sait le fruit des amours de Marcello Mastroianni et de Catherine Deneuve. Deneuve qui était par ailleurs dans les années 60 et 70 l’égérie des films de Demy et de Varda. C’est ce qui s’appelle une affaire de famille.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver BAISERS VOLÉS (C'est le même jeune homme impatient au seuil d'une nouvelle vie qui collectionne les aventures) ou encore TRAVAIL AU NOIR (C'est une comédie mettant en scène des immigrés polonais dans un pays occidental dont ils ne comprennent pas les usages).

Le signataire de A la belle étoile se nomme Antoine Desrosières. Quand il réalise ce film, son premier long métrage, il a vingt-deux ans. Un âge canonique pour celui qui a réalisé ses premiers courts métrages à douze ans. Desrosières est un fondu de cinéma, un vrai. En attestent les multiples citations qui émaillent ses films. Tour à tour acteur, réalisateur, producteur, scénariste, notre homme est un gourmand. Au cinéma, tout est bon. On lui doit d’avoir coécrit le scénario d’un film de télévision de Laurent Heynemann consacré à René Bousquet, fonctionnaire trop zélé de Vichy. Mais également d’avoir signé plus récemment deux moyens métrages de belle facture, Un bon bain chaud et Haramiste qui ont en commun d’interroger notre vivre ensemble à l’heure où les questions d’identité se font brûlantes.

Antoine Desrosières est ami de longue date de Mathieu Demy, d’une certaine manière son alter ego. Il fait presque partie de la famille. Nul ne s’étonnera donc de le voir figurer deux ans après A la belle étoile dans Les 101 nuits d’Agnès Varda, ode au cinéma où le jeune homme se retrouve entouré de Depardieu, Deneuve, De Niro ou Belmondo… Plus Mathieu Demy et Julie Gayet. Une affaire de famille, décidemment. Il en joue allègrement d’ailleurs en multipliant les clins d’œil. Nul doute que Mathieu Demy ne se serait pas rêvé enceint dans A la belle étoile s’il n’avait été le fils de celui qui avec L’événement le plus important depuis que l’homme a marché sur la lune a inventé la grossesse masculine. En l’occurrence le comédien porteur d’un bébé se nommait alors Marcello Mastroianni. Une affaire de famille…

Mais la famille de se limite pas à celle de Demy et Varda. D’une certaine manière c’est toute la Nouvelle vague qui est ici célébrée. L’instabilité amoureuse du personnage principal évoque évidemment celui d’Antoine Doinel, alter ego de François Truffaut dans cinq de ses films, et notamment dans Baisers volés, auquel nous pensons en permanence. Une autre figure de la Nouvelle vague, marginale mais pittoresque, est présente ici en la personne de Luc Moullet, qui campe pour l’occasion un professeur Nimbus un peu perché. Mais qui n’en est pas moins sensible au physique de Julie Gayet. La jeune comédienne n’était pas encore à la une des quotidiens, mais elle nous impressionnait déjà dans la peau d’une funambule polonaise à la sensualité triomphante.