COMME UN AVION

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Comme un avion est comme son titre ne l’indique pas la quête initiatique d’un fondu d’aviation qui devient un fondu de kayak le jour où il s’aperçoit que le frêle esquif ressemble au fuselage d’un aéronef.  Et puis le kayak peut également s’écrire à l’envers, et ça, ça n’a pas de prix. Dès lors Comme un avion est un film en kayak, un river movie –comme il y a des road movies – qui en réalité fait du sur-place. Sans en faire.

Parce que le film qui nous invite à partager sa douce folie hors du temps, notamment quand le film prend ses quartiers d’été au cœur d’une communauté sylvestre, qui en d’autres temps aurait été traitée de baba, ce film donc nous incite à revoir notre philosophie de la vie. La communauté en question étant d’autant plus séduisante qu’en son sein règne la reine Agnès Jaoui, toute en rondeurs épanouies et qui au passage nous apprend quelle est la meilleure façon d’utiliser les post-it. Il serait criminel d’en dire davantage.

Le cinéma de Bruno Podalydès possède une vraie unité, notre homme installant de film en film un univers loufoque qui n’exclut pas l’émotion ou même quelques considérations métaphysiques. En fait son film semble nous être livré en kit, à l’image de son kayak. Et Podalydès monte le premier comme le second, avec un soin patient et une fantaisie tenace. C’est un prototype qui nous rend heureux.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver FITZCARRALDO (C'est une autre histoire d'obsession, à une autre échelle...) ou encore PARTIE DE CAMPAGNE (C'est un autre marivaudage charmant et cruel au bord de l'eau).

Le Septième Art est souvent affaire de fratries. Les frères Larrieu, les Coen, les Tavianai ou les Dardenne nous le claironnent à longueur d’années. Les frères Podalydès font partie du lot. A ceci près que Denis est comédien –et quel comédien- et qu’il n’a aucune intention de partager avec son frère Bruno le soin de mettre en scène. Les frères sont pourtant indissociables, Denis ayant le plus souvent reçu pour mission d’être le personnage principal des films de son frère. Qu’il s’agisse de films originaux, qu’il s’agisse du diptyque adapté de Gaston Leroux où Bruno campe un Rouletabille tout à fait crédible.

Dans Adieu Berthe, le film qui précède celui-ci dans la filmo des frères, ceux-ci  sont presque à égalité, partageant une habilité à faire rire naturellement, mais dans des registres différents. Cette fois-ci c’est Bruno qui prend le pouvoir, laissant Denis sur le bord de la route. Une façon sans doute d’assumer totalement le film, en se reconnaissant dans le personnage un rien à côté de ses pompes qui rame aux sens propre et figuré avant de trouver un havre de paix au bord de l’eau, au cœur de la forêt. Buster Keaton n’est pas loin, et les impressionnistes itou. A commencer par les Renoir. Auguste et Jean confondus.

La France produit beaucoup de comédies. Nombre d’entre elles sont souvent lourdingues. Bruno Podalydès est à l’inverse l’inventeur d’une comédie délicieuse, en demi-teintes, mâtinée de burlesque. Une façon de rejoindre au sein du cinéma hexagonal Jérôme Bonnell, Pierre Salvadori ou dans un registre un peu différent Cédric Klapisch ou le couple Kasmi / Leclerc. Remarquons au passage que le premier film de Baya Kasmi s’est fait comme celui de Bruno Podalydès avec Agnès Jaoui, Vimala Pons et… Bruno Podalydès himself. Une façon de passer le relais, d’affirmer sa liberté, de larguer les amarres.

J'ai trouvé très frais ce joli film plein de tendresse de Bruno Podalydès, qui a une eu riche idée de se mettre devant la caméra, car c'est un acteur très touchant, de mon point de vue. Toutes les péripéties de ce kayakeur passionné sont délicieuses, depuis, l'achat ...

Le petit miracle (petit, hein ? On reste calme) du film tient dans sa façon très étonnante (dans le cinéma français de ces dernières années, en tout cas) d'éviter toutes les facilités et les lourdeurs. A chaque fois qu'on redoute la pesanteur, la répétition inutile, ...

Comme un avion s’annonçait comme un film sympathique. De celui où l’on retrouve avec plaisir une équipe, la fratrie Podalydès, qui sait, depuis plus de quinze ans, distiller avec finesse un regard lucide et tendre sur les remous sentimentaux, les affres du carcan familial, ...