COUPLES EN CHALEUR

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La crise du couple bourgeois en appartement haussmannien a beaucoup trop préoccupé le porno giscardien, adepte des comédies boulevardières. Aussi sommes-nous toujours agréablement dépaysés quand un cinéaste plantait sa caméra à la campagne et recréait à sa façon une version hard du déjeuner sur l’herbe, multipliant le motif de la femme nue sur fond de verdure.

La première partie de Couples en chaleur a cette qualité simple d’afficher l’insouciance d’étreintes en pleine nature, faites d’éclats de rire et de plaisanteries potagères à base de courges.

Folâtres et sans pudeur, les corps vibrants s’arcboutent, couchés près des bosquets, dans de riantes joutes. Lino et ses copains, la peau éclaboussée par le vin qui jaillit, s’enivrent de baisers. De mai soixante-huit, l’hédoniste héritage s’est partout infiltré dans le jardin sauvage de la mère esseulée qui épie en songeant, troublée par leurs ébats, leurs convulsifs élans. Beauté blonde et mature, elle jouit du végétal, et se livre à d’étranges caresses florales. Lino et son Jazz Band sont moins sophistiqués, vivent d’amour et de musique. La seconde partie les voit rouler dans leur camionnette en quête de gloire, à l’assaut de la capitale. Ils séduisent avant tout quelques mignonnes qui traînaient dans le studio d’enregistrement. C’est un porno sans autre prétention que d’offrir comme dénouement une partouze en chambre. Les acteurs s’y prêtent de bonne grâce, improvisant quelques acobaties. On notera surtout dans ce final la présence d’une quasi débutante et encore châtain, Brigitte Lahaie, souriante et presque candide, rosissant de tant d’audaces érotiques. Nous sommes en 1976.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LE SEXE EST DANS LE PRÉ (Tourné simultanément avec la même équipe de comédiens, ce film présente des similitudes avec "Couples en chaleur".) ou encore JEUNES COUPLES DÉCHAÎNÉS (De Claude Pierson, 1977. Autre porno avec un groupe musical et situé en province.).

Dans l’histoire du porno hexagonal en 35 mm, il y eut un petit courant provincial et campagnard. La figure de proue fut le provençal Robert Renzulli, suivi de près par Henri Sala qui aimait révéler des coins de la Dordogne, tandis que José Benazeraf partait souvent tourner dans son manoir normand. Mes maigres connaissances géographiques ne m’ont pas permis d’identifier le décor naturel de Couples en chaleur, que Jean Luret tourna en même temps que Le sexe est dans le pré. Mais puisqu’il est le Pdg des Films du Berri, je parierai volontiers que nous étions en Indre-et-Cher.

Pour ce petit tournage, l’équipe technique est des plus réduites, sous des pseudonymes de fantaisie. Dans le générique d’origine, le chef opérateur Jean-Jacques Renon officiait en tant qu’Omar Gouyat ; son caméraman était un certain Jules Joffrin qui a gardé tout son mystère. Et Jean Luret signait Sam Corey. Les acteurs constituent une sympathique équipe, parmi laquelle la toujours piquante et américaine Ellen Earl, hélas doublée sans accent, et Cathy Castel, l’une des vampires jumelles de Jean Rollin. La plus intrigante de toutes est la distinguée Gwenda Farnel, la mère, que nous avons vue dans des scènes hard dans une poignée de titres comme Body Love de Lasse Braun et Le Sexe qui parle II de Claude Mulot. Se masturbant avec des fleurs, elle joue là son rôle le plus insolite, le plus soft mais aussi le plus excitant, laissant le spectateur dans l’attente inassouvie d’une séquence résolument explicite.

Dernier élément de production, le vieux fourgon Peugeot J7 dans lequel voyage le Lino Jazz Band. Véhicule populaire des années 70, dont la construction cessa en 1980, il fut très certainement prêté gracieusement par le concessionnaire Peugeot dont la caméra filme ostensiblement l’enseigne.