JACKIE BROWN

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Après le triomphe planétaire de Pulp fiction, Tarantino a pris trois ans pour peaufiner l’écriture de cette adaptation d’un roman d’Elmore Leonard. D’un ensemble de personnages  multiples et imprévisibles, qui passent leur temps à se trahir, il finit par mettre en avant l’improbable histoire d’amour entre un prêteur sur gages et une hôtesse de l’air. 

Avec un mélange de virtuosité , de flair et de sincérité , il fait la démonstration  de ses considérables qualités : écriture, dialogues , choix et direction des acteurs, choix et placement de la musique, et sans oublier une capacité unique à s’inspirer de  la culture pop tout en lui rendant hommage. Seul bémol, qui n’est pas encore devenu un écueil, l’indulgence avec laquelle il laisse filer les dialogues. Malgré ses longueurs, Jackie Brown reste un film de beaucoup de superlatifs : c’est probablement le meilleur film de Tarantino, une des meilleures adaptations d’Elmore Leonard au cinéma, le meilleur rôle de Pam Grier, et on peut dire la même chose pour Robert Forster.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver U TURN ou encore HORS D'ATTEINTE .

Elmore Leonard est un écrivain régulièrement adapté au cinéma pour le meilleur (Mister Majestyk de Richard Fleischer) ou pour le pire (Joe Kidd de John Sturges). Ses personnages sont très souvent ambigus, donc imprévisibles, et ses romans fréquemment construits de la même façon, avec une première partie consacrée à l’exposition de personnages  dont on ne sait pas lequel va s’imposer, et  une seconde partie qui les voit se confronter, comme des crabes dans un panier.  

Dans presque chacun de ses romans, un personnage se trouve enfermé dans le coffre d’une voiture. Dans son adaptation du livre, Tarantino est resté fidèle à l’essentiel, mais il a effectué quelques changements notables : l’action est passée de Miami à Los Angeles , et une bonne partie des personnages ont changé de couleur, permettant à Tarantino de faire appel à des acteurs noirs et de leur écrire des dialogues particulièrement robustes.

De même qu’il  avait complètement relancé la carrrière de John Travolta dans Pulp fiction, Tarantino fait encore mieux en sortant de l’oubli deux stars du cinéma bis, Pam Grier, jusque là réputée  pour avoir alimenté les fantasmes sexuels d’une génération d’adolescents dans les années 70, et Robert Forster, qui se partageait entre les séries télé et d’obscurs  films d’action ou de science fiction. Comme d’habitude, Tarantino donne à chacun l’occasion de briller, même dans les plus petits rôles . L’un d’eux, Michael Keaton, retrouvera son role de Ray Nicolette dans Hors d’atteinte, le film de Steven Soderbergh tourné l’année suivante et lui aussi adapté d’un roman d’Elmore Leonard.

Bien que porté par une critique très favorable, Jackie Brown déçoit le public qui s’attendait probablement à retrouver la frivolité et les plaisirs faciles de Pulp fiction. C’est dommage, parce que Tarantino n’a jamais été aussi sincère et profond que dans ce film.