JOUIR À BANGKOK

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Max, charmant jeune homme bien de sa personne, est transporteur de fonds dans une société. Il est l’amant de Paulette, la secrétaire de direction de la dite société, secrétaire qui est convoitée par Germain, le PDG de la boîte. Vous me suivez ? Mais Max est également un artiste qui compose des affiches de films pornos et, lorsqu’il est viré de son boulot à la suite d’une agression, c’est tout naturellement qu’il s’envole pour l’Extrême Orient où il va pouvoir donner libre cours à ses talents d’affichiste.
L’Asie et ses perversions raffinées vont le séduire et il songe sérieusement à s’installer là-bas. Précisons qu’il y croise les ravissantes Cathy Stewart et Isabelle Bresle qui lui font goûter au savoir-faire asiatique en matière de sexe. Mais Paulette, toujours amoureuse, le rejoint sur place pour le reconquérir. Le hic, c’est que l’ignoble Germain, le PDG de la société, lui fait prendre des drogues qui la rendent totalement nymphomane et qui feraient passer Mère Térésa pour Messaline. Vous me suivez toujours ? Si oui, vous êtes très fort. Mais sachez que le scénario est moins intéressant que les scènes de sexe somptueusement filmées en 35mm où les superbes hardeuses de l’époque se donnent sans pudeur devant la caméra amoureuse de Michel Baudricourt.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver EMMANUELLE (JUST JAECKIN - 1973) (Un tournant dans l'histoire du cinéma érotique en France, un énorme succès au box office et un film réellement tourné à Bangkok avec de la figuration locale.) ou encore QUEUE DE BÉTON (1979 - MICHEL BAUDRICOURT) (A la même époque, Michel Baudricourt tournait dans les mêmes décors le film qui allait donner à Richard Allan son surnom pour la postérité).

En cuisine, Michel Baudricourt serait le master chef dans l’art d’accommoder les restes. Les emprunts, les citations et les rajouts de scènes hard constituent une bonne partie de la durée finale du film. Le talent résidant dans le fait de rendre le tout relativement cohérent. D’ailleurs, comme nous le confie Richard Allan dans une interview que je ne saurais trop vous recommander sur Filmo TV, Jean-François Davy, producteur, et Michel Baudricourt, réalisateur, étaient les spécialistes du recyclage de chutes de scènes disparates qu’ils parvenaient à insérer dans un film qui n’avait rien à voir avec le sujet initialement prévu. Richard Allan et quelques autres se découvraient aux génériques de films qu’ils n’avaient pas tournés et pour lesquels ils n’étaient évidemment pas payés. Mais, après quelques petites bagarres syndicalo-salariales qui ont secoué le Landerneau du X à l’époque, tout est depuis rentré dans l’ordre pour notre plus grand plaisir.
Dans Jouir à Bangkok, la prise de son direct nous fait savourer le ton des acteurs qui récitent leur texte comme dans un film d’Eric Rhomer, avec, reconnaissons-le, une petite différence, c’est qu’ils sont souvent pris de fou-rire devant l’incongruité de ce que leur fait dire le réalisateur. La scène où  Max fait l’amour avec Soja dans les affiches de films pornos est visiblement un hommage au Blow Up d’Antonioni où Jane Birkin et Gillian Hills se roulaient nues dans les  feuilles des cyclos du studio devant l’appareil photo voyeur de David Hemmings. Comme souvent dans ses films, Michel Baudricourt joue plusieurs rôles. On peut le voir tour à tour en braqueur, en un des amants de Paulette qu’elle découvre à son réveil chez son patron ou en Bruno, l’oncle de Soja, qui s’amuse à imiter le phrasé de Louis Jouvet lorsqu’il reçoit Paulette. Bref, Michel Baudricourt est le maître des tours de passe-passe et le roi des bricoleurs : j’en veux pour preuve l’utilisation des décors. Il ne faut pas être nécessairement un champion du jeu des 7 erreurs pour s’apercevoir que c’est le même décor, reconnaissable à sa cheminée, qui sert pour la scène dans les affiches à Paris et la partouze lesbienne à Hong-Kong. Idem pour  la chambre parisienne de Germain où il séduit Paulette et la chambre d’hôtel de cette dernière à Hong Kong. En fait, c’était un superbe appartement que louait une charmante hôtesse du côté de la rue de Rennes et qui a vu défiler un nombre incalculable de tournages X.
Une question néanmoins demeure : le titre nous propose de jouir à Bangkok cependant, les protagonistes s’évertuent à parler de Hong Kong tout au long de l’histoire... l’essentiel, finalement,  étant de jouir tout court, non ?