L'ANNÉE DERNIÈRE À MARIENBAD (VERSION RESTAURÉE)

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« Seule compte la beauté baroque de l’œuvre, délibérément répétitive, sans équivalent dans le cinéma. Succès de snobisme typiquement sixties ? Le snobisme, parfois, à du bon. » Voilà ce qu’écrivait le critique, romancier et scénariste Michel Grisolia à propos du film d’Alain Resnais L’Année dernière à Marienbad. De fait, bien plus que le scénario élaboré en 1961 par Alain Robbe-Grillet,  c’est l’objet cinématographique en lui-même qui lui a permis de traverser le temps. Mouvements de caméra, décors, voix, acteurs et musique notamment, tout concourt ici à une réussite esthétique qui vise à hypnotiser le spectateur en le plongeant dans un univers singulier.

Lion d’Or à la Mostra de Venise, le film se déroule dans un hôtel de luxe que fréquentent les trois protagonistes du film : une femme nommée A qu’incarne Delphine Seyrig pour son premier rôle à l’écran et, face à elle, deux hommes : X à l’accent italien joué par Giorgio Albertazzi et M, le mari supposé de A interprété par Sacha Pitoëff. Autour d’eux gravitent des personnages secondaires liés à la vie de l’hôtel.

Alain Resnais, comme on va le voir, explore dans ce qui est son second long métrage après Hiroshima mon amour, une trinité qui lui est chère et qui traversera son œuvre entière : le temps, la mémoire et l’oubli. La trame du film repose en effet sur la rencontre d’une femme et d’un homme, ce dernier tentant de la persuader qu’ils se sont déjà rencontrés un an auparavant, ce dont elle ne semble pas se souvenir.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver MODERATO CANTABILE (Les deux films ont en commun une période littéraire, celle du Nouveau roman et ses deux figures essentielles que sont Robbe-Grillet et Duras) ou encore INDIA SONG (Les deux films ont en commun leur actrice principale et se déroulent dans des environnements luxueux avec la mémoire et l'oubli en partage également.).

Tout au long de son importante filmographie, Alain Resnais n’a cessé comme ici de recourir à des écrivains pour trouver l’inspiration de ses films. Dès le premier, Hiroshima mon amour,  il fait appel à Marguerite Duras. Puis, c’est Alain Robbe-Grillet, le pape du Nouveau roman, qui écrit le scénario du film que vous venez de voir, d’après d’ailleurs « L’Invention de Morel » le roman fantastique d’un autre écrivain, l’Argentin Adolfo Bioy Casares.  D’autres écrivains seront ainsi associés au cinéma de Resnais dont Jorge Semprun, Henry Bernstein, Alan Ayckbourn et Jean Anouilh, entre autres.

Le montage du film fait partie intégrante de son alchimie si particulière. On le doit à Henri Colpi avec lequel à l’époque Alain Resnais avait travaillé à trois reprises déjà. En 1955, ils avaient tous deux assuré le montage du film d’Agnès Varda, La Pointe courte. Pour le documentaire Nuit et brouillard d’abord en 1956 puis pour Hiroshima mon amour trois ans plus tard, c’est Henri Colpi qui en avait assuré le montage. Hasard du calendrier, l’année de la sortie de L’Année dernière à Marienbad, Henri Colpi reçut la Palme d’Or au Festival de Cannes avec son premier long métrage comme réalisateur, Une aussi longue absence.

L’influence du film de Resnais sur d’autres cinéastes en France et dans le monde n’est plus à démontrer. De Rivette à Kubrick en passant par Fellini, beaucoup ont reconnu cette dette. Récemment encore, le cinéaste américain Christopher Nolan au moment de la sortie de son film Inception fit cet étrange aveu : « Je n’ai vu L ‘Année dernière à Marienbad qu’après avoir réalisé mon film. Et certains vont penser à tort que j’ai copié Resnais, alors qu’en fait j’ai copié des films qui ont eux-mêmes copié le film de Resnais ». Effet de miroir assuré qui n’aurait pas forcément déplu à Resnais, l’illusionniste par excellence.

Là-bas à Marienbad Le temps voyage entre deux présents Les murs respirent Et les statues observent. Quelques fantômes de marbre hantent le somptueux château Murmurent des mots silencieux. Des baisers suspendus au bout des lèvres se balancent Jamais donnés, jamais reçus. ...

La continuité entre L’Année dernière à Marienbad et Hiroshima mon amour est évidente : Resnais, sous l’égide d’un écrivain de renom, y explore la complexité amoureuse et l’expérimentation cinématographique. Deux éléments vont particulièrement faire le lien ...

L'Année dernière à Marienbad est un film spécial, dans le sens où rarement un film n'aura été si désorientant, si perturbé, et cependant si beau. Bon, ça parle d'oubli, ça parle de rencontre, de souvenirs, dans un château, dans le jardin, et c'est simplement inoubliable. Les ...