L'ATTENTAT

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Quand Yves Boisset réalise L’Attentat, en 1972, il a déjà plusieurs réussites au compteur, des polars de belle facture, comme Coplan sauve sa peau ou Le Saut de l’ange, qui signalent l’amateur de films noirs, admiratif des grands classiques du genre venant d’Hollywood. N’est-il pas le cosignataire, avec Bertrand Tavernier et Jean-Pierre Coursodon, lors de ses premières éditions, d’un dictionnaire des cinéastes américains ? Mais c’est Un condé, réalisé un an plus tôt, qui a révélé sa vraie nature. Celle d’un cinéaste engagé. Engagé mais pas nécessairement militant. Car Boisset ne roule pour aucun parti et se targue d’être le grain de sable qui enraye les plus belles mécaniques quand elles font fi des droits élémentaires de l’individu et se réfugient derrière la raison d’Etat. Nul mieux que Boisset n’incarne ce cinéma-là, qui prend à bras le corps les sujets les plus sensibles pour mieux dénoncer les zones grises du pouvoir. A l’égal d’un Costa-Gavras, mais en choisissant des sujets souvent plus proches de nous, historiquement et géographiquement, Yves Boisset a ainsi signé une belle série de films qui restent gravés dans toutes les mémoires, de RAS, témoignage poignant de la guerre d’Algérie, au Pantalon, portrait déchirant d’un fusillé pour l’exemple pendant la guerre de 14, en passant par Dupont-Lajoie, chronique du racisme et de la veulerie ordinaires, Le Juge Fayard dit le Shériff, dénonciation musclée de la collusion entre le grand banditisme et les barbouzes gaullistes ou encore Allons z’enfants, qui raconte le chemin de croix d’un enfant de troupe qui rêvait d’un autre destin, les films de Boisset sont autant de ballons d’oxygène dans un cinéma français sans doute frileux.
Nous ne citerons pas tous ses films, plus de quarante en tout, cinéma et télévision confondus. Mais revenons sur L’Attentat, l’un de ses plus beaux. Parce que c’est un thriller avant même d’être un pamphlet, un thriller fort. Parce que le personnage central, interprété par Jean-Louis Trintignant est particulièrement intéressant, qui se range d’abord par faiblesse dans le camp des comploteurs avant de faire le choix de la vérité. Parce que la distribution est absolument incroyable : outre Trintignant, déjà cité, ne croise-t-on pas Michel Piccoli, Philippe Noiret, Jean Bouise, Michel Bouquet, François Périer ! Et même plusieurs stars internationales : Gian-Maria Volonté, qui a attaché son nom à quelques uns des plus grands films politiques transalpins, Jean Seberg, la petite vendeuse du Herald Tribune dans A bout de souffle et Roy Scheider, le futur chasseur du requin des Dents de la mer ?

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LA LETTRE DU KREMLIN (La raison d'Etat permet tous les débordements.) ou encore Z (Un assassinat politique dans les années 60.).

Réalisé en 1972, L’Attentat est de toute évidence un film contemporain. Les voitures ou le mobilier urbain datent bien des années 70, tout comme les vêtements ou les coupes de cheveux. Pour ne rien dire des allusions à Mai 68 ou aux éléments gauchistes qui donnent de l’urticaire aux tenants du pouvoir. Pourtant, même si les noms ont été changés, si le film se résout à quelques raccourcis, L’Attentat raconte bel et bien l’affaire sans doute la plus célèbre, la plus empoisonnée, celle qui a laissé une trace indélébile dans la mémoire de la 5ème République, l’affaire Ben Barka. Ce qui nous oblige à remonter le temps de quelque sept ans de plus. Mehdi Ben Barka était un homme d’Etat marocain et socialiste, opposant numéro 1 du roi Hassan II. Son aura était grande, qui dépassait les frontières de son pays, puisque notre homme était également l’un des leaders de la Tricontinentale, un mouvement progressiste et tiers-mondiste qui trouvait davantage de sympathies chez Castro par exemple que chez l’Oncle Sam. Autant le dire, ce Ben Barka avait des ennemis. Ce qui lui a valu d’être la cible de nombreux attentats avant de disparaître définitivement le 29 octobre 1965 devant la brasserie Lipp, boulevard Saint-Germain, lorsqu’il est embarqué par deux policiers français.

Car c’est bien là que le bât blesse pour ceux qui aiment à savoir la France dans le camp des démocraties (quitte à se révéler de grands naïfs) : l’affaire révèle une certaine collusion, d’évidentes complicités entre les services secrets marocains, au service du peu ragoûtant colonel Oufkir, certains policiers français et quelques crapules de très bas étage. Une tache sur le règne du Général de Gaulle, quel que soit le jugement que l’on porte par ailleurs sur sa place dans l’Histoire. N’a-t-il pas déclaré : « Du côté français que s'est-il passé ? Rien que de vulgaire et de subalterne. Rien, absolument rien, n'indique que le contre-espionnage et la police, en tant que tels et dans leur ensemble, aient connu l'opération, a fortiori qu'ils l'aient couverte. » ? En l’occurrence il n’est pas interdit de douter de sa sincérité.

L’Attentat est sans doute le premier film à traiter de l’affaire de façon frontale, mais il n’est pas le seul. Made in USA, de Godard, et même Le Grand restaurant, de Jacques Besnard y faisaient allusion. Tout comme L’Albatros, de Mocky. Souvenez-vous du : « Ils enterront cette affaire, tout comme ils ont enterré l’affaire Ben Karba et l’affaire Carmovitch ». Un gros clin d’œil. Mais nous n’avons pas le temps d’aborder l’affaire Marcovitch. Plus près de nous, deux films se sont lancés dans l’aventure, L’Affaire Ben Barka, de Jean-Pierre Sinapi, et J’ai vu tuer Ben Barka, de Serge Le Péron. Ce dernier film est sans doute plus précis pour relater l’affaire que ne l’est celui de Boisset, à ceci près qu’il reste flou quant à la responsabilité des Marocains. C’est Charles Berling qui incarne Georges Figon, qui reprend donc le rôle de Jean-Louis Trintignant, alors que Mehdi Ben Barka est interprété par Simon Abkarian. Ironie des castings : c’est le même Simon Abkarian qui incarne son bourreau, le colonel Oufkir dans L’Affaire Ben Barka !

Reste à révéler que cette affaire est aussi une histoire de cinéma, puisque le film de Le Péron nous le révèle, c’est parce qu’il avait un projet cinématographique avec Georges Franju et Marguerite Duras que Ben Barka allait chez Lipp…

Deux ans après son premier grand succès ("Un condé"), Yves Boisset signe un nouveau film polémique, s'attaquant aux heures les plus sombres du pouvoir gaulliste, avec la fameuse affaire Ben Barka, certes abordée de manière indirecte (les véritables noms des protagonistes ...

Bien que tous les noms aient été modifiés et que les actions menées relèvent probablement de la fiction, "l'Attentat" est un film qu' Yves Boisset a réalisé en 1972 où il met en scène un complot concernant l'élimination de l'homme politique marocain, Mehdi Ben Barka. ...

Yves Boisset signe un film remarquable avec l'Attentat.Il prend le temps d'installer l'histoire, s'inspirant de l'affaire Ben Barka où un politique de gauche "dérangeant" se fait enlever (et tuer) à Paris. Il créé peu à peu un thriller parano, totalement ...