L'ÉPINE DANS LE COEUR

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Un qualificatif revient très souvent pour évoquer le cinéma de Michel Gondry et sa forme de bricolage artisanal : personnel. Il est particulièrement approprié en ce qui concerne L'épine dans le coeur, film à part dans la filmographie du réalisateur d'Eternal sunshine of the spotless mind ou La science des rêves.

Gondry y retourne en quelque sort sa caméra vers lui-même, ou du moins une partie des plus intimes : sa famille. L'épine dans le coeur suit en particulier Suzette, la tante du réalisateur, institutrice dans un village des Cévennes. A l'époque, le metteur en scène sort tout juste d'une période américaine qui s'est achevée avec Soyez gentils, rembobinez. C'est ce que fait ce film particulier qui remonte les souvenirs du clan Gondry, à coups d'interviews commémoratives ou d'images en super 8.

Le portrait d'une famille harmonieuse se teinte progressivement de zones plus douloureuses avec l'entrée en scène de Jean-Yves fils de Suzette, qui a grandi avec son ressenti d'enfant mal-aimé. Plus Gondry resserre son cadre sur lui, plus c'est celui sur son cinéma qui s'élargit. Le drame de Jean-Yves éclaire soudain sur sa part d'enfance comme sa mélancolie persistante ou sa part dépressive. Avec L'épine dans le coeur, on comprend un peu mieux, pourquoi les films de Michel Gondry ont toujours quelque chose d'accidenté, de cassé. 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver RONDE DE NUIT (Edgardo Cozarinsky remonte la chronologie de sa famille pour percer le mystère de son père) ou encore FESTEN (La matrice du film de "déballage familial", mais dans la fiction.).

Initialement, L'épine dans le coeur ne devait être qu'un portrait de Suzette Gondry, la tante adulée par son neveu. Il lui doit probablement une grande partie de son inspiration de cinéaste, par son sens d'une pédagogie hors-norme, n'hésitant pas à sortir audacieusement des codes de l'éducation nationale. L'arrivée dans le champ de son cousin Jean-Yves à chamboulé le projet de départ.

Il n'est pas impossible de penser que Jean-Yves est l'autre pierre fondatrice du rapport au cinéma de Michel Gondry. Surtout lorsque l'on découvre que ne pouvant révéler son plus grand secret à son institutrice de mère, il s'était alors refermé sur lui-même, cloîtré dans une pièce où il bricola un colossal train électrique ou tourna des films en super 8.

Après tout, L'épine dans le coeur est sans doute aussi un autoportrait par procuration de Gondry, à la fois film sur l'héritage inconscient que lèguent les familles, des valises psychanalytiques remplies de joies et de souffrance. Que Michel Gondry décide de leur rendre hommage avec sincérité n'est pas la moindre émotion de ce film des plus délicats.

"Suzette, c’est ma grand-mère maternelle qui perd la mémoire petit à petit. Quand Suzette pleure en parlant de la mort de son mari, vous aussi, vous enlaceriez votre télé. C’est avec beaucoup de pudeur et de tendresse que Gondry nous peint cette drôle d’instit’ avant-gardiste, ...

Toujours en quête de savoir et de souvenirs, Michel Gondry passe au documentaire ici. Et en partant d'un sujet qui devrait peu nous intéresser, il déterre autre chose... Car avec ce film, au départ, il souhaite juste raconter l'histoire de sa tante, Suzette Gondry. Celle ci ...