LANDRU

en VOD

Henri Désiré Landru a une grande famille et des soucis d’argent. Même avec ses petites escroqueries il ne s’en sort plus. Alors, à la faveur de la première guerre mondiale il séduit des femmes esseulées, les dépouille et les trucide.

Nous allons voir une reconstitution du pathétique destin de Landru, le premier tueur en série recensé en France et qui allait devenir, déjà, une pop star lors de son procès, et ce grâce à la presse.

Le film est signé en 1963 de Claude Chabrol qui a écrit le scénario avec la grande Françoise Sagan. Landru est incarné par un quasi inconnu à l’époque, monsieur Charles Denner. Côté victimes ou compagnes mesdames Danielle Darrieux, Michèle Morgan, Stéphane Audran, Juliette Mayniel et Catherine Rouvel. C’est un film sur un homme qui n’aimait pas les femmes.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver DOCTEUR PETIOT DE CHRISTIAN DE CHALONGE (1990) (L'autre grand tueur en série, qui sévit lui, pendant la Seconde guerre mondiale est évoqué dans ce film expressionniste où Michel Serrault livre une composition vampirique de ce fou criminel. Une oeuvre quasi onirique, en hommage aux grands cinéastes allemands du muet.) ou encore MONSIEUR VERDOUX DE CHARLIE CHAPLIN (1947) (Sur un scénario d'Orson Welles, un film cruel de Chaplin, librement inspiré de la biographie de Henri Désiré Landru. Très mal accueilli aux Etats-unis, il a bien marché en Europe, où la transformation du personnage de Charlot en un être ambigu a été très apprécié.).

Maître Chabrol sur un arbre perché regarde vivre les hommes avec dans sa bouche un film narquois. En 1962 c’est encore un galopin en phase d’assagissement de la Nouvelle Vague. Mais Georges de Beauregard est là pour lui produire son Landru, comme cette année-là, il produira Godard et son « Petit Soldat ». Une dream team est convoquée avec, à l’écriture, la drôlesse aux pieds nus, celle de « Bonjour tristesse », Françoise Sagan et ses 28 ans. C’est le premier scénario écrit par l’écrivain, il n’y en aura que quatre autres.

Au départ Chabrol et Sagan planchait sur la vie de George Sand. Mais ils trouvaient le personnage antipathique et son destin sordide quand surgit l’idée de Landru. L’homme qui avait assassiné onze personnes, avait multiplié les bons mots pendant son procès et avait été guillotiné en février 1922, sans jamais rien avouer. Après quelques essais Chabrol a porté son choix pour jouer Barbe-Bleue, sur un acteur singulier qu’il avait repéré au TNP de Jean Vilar, un vieux jeune homme de 36 ans qui n’avait joué que des rôles insignifiants au cinéma. Il est assez paradoxal d’observer qu’après avoir joué le don juan massacreur, l’acteur sera quinze ans plus tard pour Truffaut « l’homme qui aimait les femmes ».

Le film fictionne au minimum jusqu’à son dernier quart où il reprend intégralement les minutes du procès. On notera la présence du réalisateur Jean-Pierre Melville, père putatif de la Nouvelle vague, dans le rôle du futur ministre de l’intérieur, Georges Mandel. Enfin, pour l’anecdote, Fernande Segret, la dernière maîtresse de Landru, jouée par Stéphane Audran dans le film, intentera un procès en diffamation à la production. Elle le gagnera, touchera 10 000 francs de dommage et intérêts et la jurisprudence servira à définir un « droit à l’oubli » dans le droit français. Faut se méfier des veuves. Après Monsieur Verdoux de Chaplin, la postérité avait pourtant bien traité Landru.

On comprend que ça puisse gêner, faire d'un salopard, un personnage qu'on n'arrive pas à trouver antipathique était une gageure, mais cela permet à l'humour noir qui domine ce film de fonctionner à fond. Bien sûr, tout (ou presque) est prévisible, mais c'est très bien ...

Le film est étrangement, malgré la lourdeur du sujet, malgré la réalité glauque qui l'entoure, proche de la comédie mais une comédie grinçante, sinistre, teintée d'humour noir. Il n'y a guère que Polanski pour développer des atmosphères sembables dans une sorte d'humour ...

Charles Denner était une très bonne idée pour incarner Landru. Il prend ici une voix grave, parfois rocailleuse, souvent suave ou insinuante. Sa manière de trifouiller dans son poêle ou de conter fleurette en jouant sur des équivoques dont ses victimes ne se rendent pas compte ...