LES FILMS INTERDITS DES MAISONS CLOSES

en VOD

Le bel Armand est un voyou qui s’est enrichi dans les maisons de passes. Avec complaisance, sans le moindre esprit critique, un journaliste l’interviewe dans un bar sélect sur les riches heures de sa carrière dans le proxénétisme. Il évoque son expansion dans les pays d’Amérique latine, son retour en France et la fermeture des bordels. « Marthe Richard a tout cassé », regrette-t-il.

Mais ces petites séquences de liaison tournées en vidéo ne constituent pas l’intérêt essentiel du film, qui compile plusieurs courts métrages de pornographie primitive, tournés anonymement dans les années 1920-1950. Pour justifier ce programme, le réalisateur Jean-Claude Roy fait passer son maquereau pour un producteur de ces bandes qui furent très longtemps baptisées par les historiens de « films de bordels ». Ils avaient pour vocation de retenir la clientèle et de la mettre en condition.

Certains sont privés de leur titre d’origine, d’autres sont des classiques comme La Grande Bagarre, Solitude et Miss Dynamite. On constate alors qu’il n’a pas fallu attendre la fin des années 1960 pour filmer des actes sexuels non simulés. Tout le langage de la pornographie se précise déjà dans ces productions, en particulier les gros plans génitaux. Un titre est des plus rares, jamais encore vu dans d’autres compilations du genre : Un de mort ! Au suivant…

 
Dans le même genre vous pouvez trouver POLISSONS ET GALIPETTES (Excellente compilation de pornos clandestins des années 1920-1950.) ou encore LE CHEMIN DE RIO (De Robert Siodmak (1937): les récits exotiques du bel Armand pourraient ressembler à ce film sur la traite des blanches.).

Le générique de ce film de 2005 est des plus succincts : Samouraï Films présente. Il s’agit de la dernière maison de production du réalisateur Jean-Claude Roy, à qui l’on doit probablement les segments de liaisons de l’entretien avec le proxénète, interprété par un comédien.

La prostitution est un sujet qui a toujours passionné Roy. Il lui doit son premier gros succès commercial, Dossier prostitution, un film-enquête reconstitué dont on voit d’ailleurs quelques extraits ici. Il y mêlait ses saynètes fictionnelles avec quelques images documentaires dont une intervention de Marthe Richard, la célèbre espionne abolitionniste qui fit fermer les bordels en 1946. Avec Les films interdits des maisons closes, la rigueur historique est malmenée.

Le texte d’introduction resasse des poncifs que les historiens du cinéma érotique ont contribué à colporter. Dire que cette production clandestine était conçue pour les bordels est un raccourci fautif. Aucun rapport de police ne fait état de salle de projection spécialement aménagée dans les maison closes ni de projections régulières. Au contraire, il y a des saisies de matériels, car l’exploitation de ces films était prohibée, y compris dans ces lieux. Les tenanciers prenaient trop de risque à les projeter. Le film de bordel est un mythe, même si certains y furent diffusés. De même, il semble farfelu d’attribuer ces films à des gens du milieu. Ils étaient le fait de professionnels du cinéma, ayant accès à du matériel de développement et étaient surtout vendus par correspondance à une clientèle privée.