NOIR ET BLANC

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Coup d’essai, coup de maître : sélectionné au Festival de Cannes en 1986, Noir et blanc, le premier film de Claire Devers obtint avec la Caméra d’Or la distinction adéquate. Cette année-là, le maître de cérémonie s’appelait Patrick Poivre d’Arvor et Claire Devers reçut sa récompense des mains de l’actrice Laura Del Sol et du cinéaste Carlos Saura venus présenter, eux, le film de clôture L’Amour sorcier. L’attention du jury cannois de la Caméra d’Or fut attirée par cette relation sadomasochiste entre un jeune homme blanc qui exerce la profession d’expert-comptable, et le masseur noir d’une salle de gymnastique et de musculation dont il est censé faire l’audit. Si la cinéaste a écrit seule le scénario de son film, elle n’a jamais caché qu’elle s’était fortement inspirée d’une nouvelle de Tennessee Williams intitulée Le Masseur noir et dont elle a repris la trame principale. Cette dépendance d’un homme à la violence physique ou psychologique d’un autre homme constitue la trame de films français antérieurs à celui de Claire Devers comme Une étrange affaire de Pierre Granier-Deferre ou Une affaire de goût de Bernard Rapp, ou postérieurs comme Trois huit de Philippe Le Guay ou bien encore Beau travail de Claire Denis. Des œuvres fort différentes certes, mais qui ont toutes en commun d’explorer et de disséquer des relations aussi troubles que complexes, mais profondément humaines.

 
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Titulaire d’une maîtrise de philosophie et ancienne élève de l’Idhec, Claire Devers, après Noir et blanc, a multiplié les incursions dans des genres cinématographiques et des univers fort différents sans pour autant abandonner certaines constantes. Elle manifestait ainsi la  ferme volonté  de ne pas se laisser enfermer dans une catégorie définie par avance tout en creusant le sillon d’une œuvre exigeante. C’est ainsi qu’après Noir et blanc tourné dans la fièvre d’un film de fin d’études, viendra Chimère, doté d’un budget beaucoup plus confortable, avec deux valeurs montantes du cinéma français, Béatrice Dalle et Wadeck Stanczak. Le troisième film, Max et Jérémie organisait à l’écran l’improbable  mais stimulante rencontre deux acteurs confirmés et populaires : Philippe Noiret et Christophe Lambert. Le milieu des tueurs à gages servait de toile de fond à un récit d’apprentissage peu banal. Au-delà des différences formelles, on retrouvait cependant l’univers presque exclusivement masculin de Noir et blanc. Sept ans plus tard, en 1999, avec La Voleuse de Saint Lubin, et dans le cadre d’une commande et d’une collection d’Arte intitulée Gauche-Droite, la cinéaste arpentait les terres du cinéma politique et social en faisant de l’actrice Dominique Blanc une mère de famille contrainte de voler par nécessité pour nourrir ses enfants. Quant au film Les Marins perdus, sorti en 2003, il permettait à Claire Devers d’adapter un roman de Jean-Claude Izzo. Dans ce huis clos entre terre et mer, avec Bernard Giraudeau dans le rôle principal, Claire Devers mettait à nouveau en scène deux hommes aux prises avec leurs rêves et la réalité. Autant de films qui chacun à sa manière éclaire rétrospectivement les premières pistes esquissées dans Noir et blanc.