PEPI, LUCI, BOM ET LES AUTRES FILLES DU QUARTIER

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Les années de jeunesse de Pedro Almodóvar ne laissaient guère présager sa carrière future, mais c’était sans compter son goût pour les paradoxes. Formé chez les pères salésiens et franciscains, il devient profondément anticlérical. Au lieu de rentrer dans une école de cinéma (son objectif initial), il est embauché aux Télécom espagnoles... mais c’est grâce à sa paie qu’il s’achète sa première caméra Super-8.

A l’aube des années 70, il débute ses activités artistiques en filmant des courts métrages très provoc et en intégrant une troupe de théâtre underground où il rencontre notamment celle qui va devenir sa première égérie, l’actrice Carmen Maura. Avec elle, il tourne un premier long métrage en Super-8, Folle... folle... folleme Tim!, que je m’abstiendrai de traduire tant le titre est cru.

Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier constitue bel et bien son premier véritable long métrage, construit autour de la personnalité de Carmen Maura et de la mouvance underground de la fin des années 70, faisant suite à la mort du dictateur Franco. Bienvenus dans la Movida espagnole triomphante.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver EASY RIDER (DENNIS HOPPER, 1969) ou encore TOUT SUR MA MÈRE (PEDRO ALMODÓVAR, 1999) .

Coutumier des apparitions fugaces dans la plupart de ses films, sans doute avez-vous reconnu Pedro Almodóvar, lui-même, en maître des réjouissances dans une cérémonie transgressive pas piquée des hannetons. On pouvait aussi reconnaître dans cette même scène son frère, Agustín, fidèle producteur de chacun de ses films depuis La Loi du désir. Enfin, avez-vous reconnu la jeune femme parfaite des clips publicitaires provocateurs conçus par Pepi ? Il s’agit en effet de la future héroïne du Labyrinthe des passions et surtout de Tout sur ma mère, la comédienne argentine Cecilia Roth.

Il n’est pas exagéré de citer Carmen Maura comme l’actrice fétiche d’Almodóvar. Car non seulement, elle a assisté à ses premiers pas de cinéaste, contribuant à sa façon à la naissance de son style, mais elle a collaboré à 9 reprises avec lui ! Marisa Paredes a quant à elle tourné 6 fois avec lui, tout comme Rossy de Palma, mais cette dernière restant cantonnée dans des rôles secondaires. Autres figures emblématiques du cinéaste : Antonio Banderas (6 collaborations), Penélope Cruz (4) et Victoria Abril (3).

Prémices de « l’esprit Almodóvar », on retrouve dans cette première folie la plupart des thématiques, obsessions et ingrédients qui jalonneront ses films suivants. « Sex, drugs and rock’n roll » pourrait-on presque dire, sur un ton qui allie références clins d’oeil à la limite de la parodie, folie douce, farces potaches et provocations. Coeurs brisés, passions romanesques, jalousies, familles dysfonctionnelles, tout y est déjà. On croise aussi les maîtres de son panthéon personnel : homos, masos, femmes à barbe ou mangeurs de crottes de nez ! Le cinéma de Pedro Almodóvar est certes aujourd’hui plus mûr et profond, mais il n’a rien perdu de sa fantaisie et de sa générosité.