SHANGHAI SURPRISE

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Un an, presque jour pour jour, après leur très médiatisé mariage sur la plage de Malibu, Madonna et Sean Penn sont à l’affiche de Shanghai Surprise, qu’ils présentent comme le premier titre de leur future commune filmographie. La brièveté de leurs matrimoniales aventures et l’accueil plutôt mitigé réservé à ce premier opus mirent prématurément un terme à leurs projets d’étroite collaboration.

Sous la direction de Jim Goddard – avec deux « d » –, les tourtereaux se retrouvent, ici, au cœur du Shanghai surpeuplé de l’entre-deux-guerres ; elle, en prude missionnaire essayant d’évangéliser les foules ; lui, en vendeur de cravates phosphorescentes mal embouché. Leur destin basculera à l’instant où ils se croiseront dans le port de la mégapole chinoise.

Face à une blonde Madonna, rappelant Jean Harlow ou Carole Lombard, Sean Penn emprunte largement à Clark Gable et à Humphrey Bogart. Ce véritable hommage au cinéma des années 1930 fut voulu et coproduit par George Harrison. Ex-benjamin des Beatles – qui, jadis, chantèrent Lady Madonna ! –, ce fringant quadragénaire, reconverti dans le cinéma, interprète, ici, la chanson du générique et, de plus, fait à ses fans le cadeau d’une brève apparition !

 
Dans le même genre vous pouvez trouver BLANCHES COLOMBES ET VILAINS MESSIEURS (1955) (C’est pour gagner un pari que Sky, mauvais garçon newyorkais, va séduire (et finalement épouser) une jeune fille toute dévouée à l’Armée du Salut.) ou encore A L’EST DE SHANGHAI (1932) (Bien qu’il n’obtînt pas le succès escompté, ce 16e film d’Alfred Hitchcock (alors âgé de 32 ans) est, pour sa période anglaise, son film préféré.).

Lorsque Shanghai Surprise sort en France en octobre 1986, Madonna est au faîte de sa gloire. Elle n’a pas encore lancé sa petite culotte dans le parc de Sceaux – elle le fera un an plus tard –, mais son deuxième album – Like a Virgin – s’est déjà vendu à 21 millions d’exemplaires et sa carrière au cinéma a déjà commencé avec Recherche Susan désespérément, de Susan Seidelman. En revanche, à la même époque, Sean Penn n’a pas encore l’aura que la suite de sa carrière lui confèrera. Dans la presse française, qui ignore ses précédentes prestations, on l’appelle « Monsieur Madonna » et on le dit fils d’Arthur Penn – le réalisateur de Bonnie and Clyde ! En réalité, son père était un modeste comédien – blacklisté par McCarthy –, devenu réalisateur de séries télé : Leo Penn !

N’empêche, il est touchant de constater que, pour sa jeune épouse, Sean est un « modèle » dont « l’expérience » et « les conseils » l’aident énormément. Il faut dire que, dans le Figaro, Madonna déclare, également : « Jouer un personnage aussi riche et complexe fut pour moi un véritable pari. » Un pari qui lui valut, pourtant, en 1987, le terrible Razzie Award de la pire actrice. A Gérard Jourd’hui qui l’interviewe dans le Nouvel Observateur, elle avait pris soin d’annoncer : « Quand j’aurai 45 ans, j’espère bien être devenue une grande actrice ». Elle n’en avait que 28 à l’époque ! En attendant, elle avoue préférer à tout le reste : « la lecture des auteurs comme Joyce, Hemingway, Salinger et Marguerite Duras. C’est mon plus grand plaisir, insiste-t-elle, juste après celui d’embrasser mon mari. »

Bide retentissant aux Etats-Unis, Shanghai Surprise fut relativement mieux accueilli en France, surtout par ceux, qui y virent une bande dessinée sans prétention, tels Aurélien Ferenczi qui, dans le Quotidien de Paris, annonce que ce film « se déguste comme une BD un peu démodée ». De même, presque enthousiaste et un brin lyrique, Jean-Luc Douin, dans Télérama, affirme que « l’imagination du scénariste court avec la magie bariolée d’une bande dessinée ». Dans le Monde, Michel Braudeau voit les choses très différemment, qualifiant Madonna d’« actrice navrante », sans oublier le « sourire de débile léger de Sean Penn ». Si, comme le constate Robert Chazal dans France Soir, « le film n’a pas les qualités de ceux qu’il imite », sa totale absence de prétention permet, en revanche, de mettre les rieurs de son côté. Ainsi, Dominique Jamet juge le film tourné « à la va comme je te pousse-pousse », avec, ajoute Jean-Paul Grousset du Canard enchaîné, des trafiquants de drogue « tenant le haut du pavot » !