THE COAST GUARD

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Le cinéaste coréen Kim Ki-duk a pour habitude de retenir très peu d'acteurs professionnels dans ses distributions, de même qu'il retravaille très rarement avec ses comédiens. Il souhaite en effet ainsi que ses interprètes soient vierges aux yeux des spectateurs pour mieux pleinement incarner ses personnages de fiction. Pourtant, pour The Coast guard, s'il recrute pour l'essentiel de véritables militaires ou des amateurs vivant dans la région, il trahit aussi ses principes en confiant son rôle central à Jang Dong-kun, une star locale du cinéma commercial, révélé par la télévision et la chanson, estimant qu'il serait tellement loin de son registre habituel, qu'il serait comme neuf. Enfin, il fait débuter la jeune Park Ji-a, actrice de théâtre qui reçoit là son premier grand rôle, et qui deviendra une de ses égéries puisqu'il la dirigera à nouveau dans Printemps, été, automne, hiver... et printemps puis dans Souffle. Nous allons immédiatement rejoindre les personnages de Kim Ki-duk en plein exercice militaire. Pour la petite histoire, les acteurs ont d'ailleurs suivi une véritable préparation militaire de plusieurs semaines avant le tournage (star ou pas) et la presse fut conviée aux tests de clôture de cette session, avant même le début du tournage. Présentez armes !

 
Dans le même genre vous pouvez trouver RAMBO (TED KOTCHEFF, USA-1983) ou encore JOINT SECURITY AREA (PARK CHAN-WOOK, CORÉE DU SUD-2000) .

On se souviendra longtemps du combat de boxe sur ce ring à même l'océan et cerné de barbelés. Ou de cette jeune femme qui, venant de subir un avortement sauvage, se réfugie dans un aquarium qu'elle colore de son sang. L'élément aquatique, souvent présent dans le cinéma de Kim Ki-duk, était déjà particulièrement crucial dans L'Ile, le film qui l'a révélé internationalement. Cette femme détruite qui se donne aux hommes est aussi symptomatique de l'univers du cinéaste qui, à ses débuts, avait été vivement accusé de misogynie. Dans nombre de ses films, le sexe se teinte de cruauté. Ici, c'est avant tout la folie qui habite ses héros, qui provoque leur violence. Ils se comportent comme des fantômes (chers à l'imagerie asiatique), fantômes qui hantent inlassablement les lieux du drame. Les apparitions de son héroïne ponctuées par une musique enfantine pourrait évoquer un angélisme bafoué, mais elle-même déploie cynisme et vengeance. Le propos central du film reste son regard sur les frontières, inépuisable source d'inspiration cinématographique autant en Palestine qu'au Mexique, tout comme il pouvait l'être à l'époque du Mur de Berlin. En Corée, les relations entre Nord et Sud ont notamment inspiré Joint Security Area, l'un des premiers films de Park Chan-wook (l'auteur consacré de Old boy), ou encore Shiri et Frères de sang. Kim Ki-duk filme paradoxalement ces rituels guerriers, désuets et inopérants. Il place ces barbelés devant un magnifique coucher de soleil ! Comme pour renforcer encore l'aberration de ces pratiques et le fossé qui existe entre le quotidien des soldats et la vision qu'en ont leurs voisins civils. On notera la symbolique de ce terrain de football en forme de péninsule coréenne et divisé en deux par des barbelés, ou du rire hystérique de l'héroïne, rendant ubuesques et ridicules les actes militaires. Le message de Kim Ki-duk est parfaitement limpide : la méfiance maladive et la suspicion hors de propos des militaires gangrènent toute l'île et la plongent inéluctablement dans une folie dévastatrice.