UNE VIE SECRÈTE

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Une vie secrète évoque l’histoire  d’une « taupe », un homme contraint de se cacher pour échapper aux troupes franquistes pendant la Guerre civile espagnole. Cette période a inspiré de nombreux film. Espoir, Sierra Teruel (1938), version adaptée par André Malraux de L’Espoir. Pour qui sonne le glas (1943) de Sam Wood, inspiré d’Ernest Hemingway. Mourir à Madrid (1963), documentaire de Frédéric Rossif, L’Esprit de la Ruche de Victor Erice (1973), Land and Freedom (1995) de Ken Loach et l’horrifique  L’Echine du diable (2001) de Guillermo Del Toro en sont de bons exemples. 

Aitor Arregi, Jon Garaño et Jose Mari Goenaga travaillent ensemble depuis près de 20 ans et la fondation de leur de leur société de production Moriarti. Une vie secrète est le premier film qu’ils signent en trio. On leur doit des films réalisés en binôme qui ont connu de grands succès en Espagne et ont reçu de nombreuses récompenses  : Handia (2017), prix spécial du jury de la 65e édition du Festival du film de San Sebastian,  a remporté 10 Goyas.  Loreak (2014), 80 jours (2010) et Lucio (2007) font aussi partie de leur filmographie.

Antonio de la Torre est un comédien espagnol aussi prolifique que talentueux. Découvert par Alex de la Iglesia pour Le Jour de le bête (1995), il est l’un des acteurs fétiches de ce cinéaste. Il s’est aussi illustré dans des œuvres aussi diverses que Ne dis rien (Icíar Bollaín, 2004), Volver (Pedro Almodovar, 2005), La Isla Minima,  (Alberto Rodriguez, 2015) et El Reino (Rodrigo Sorogoyen, 2019). Belén Cuetsa fait partie de la distribution de la série La Casa de Papel depuis 2019.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LAND AND FREEDOM (Ken Loach évoque lui aussi la guerre d'Espagne avec cette fresque passionnante.) ou encore LETTRE À FRANCO (Alejandro Amenabar revient sur l'avènement du général Franco après le coup d'état de 1936 dans ce film historique puissant.).

Pour l’histoire d’Une vie secrète, les réalisateurs ont puisé leur inspiration dans un documentaire qu’ils ont vu au Festival de San Sébastian en 2012. Trente ans d’obscurité de Manuel H. Martin évoquait notamment l’expérience réelle de Manuel Cortes, le maire d’une petite ville près de Malaga.  Ils n’avaient jamais entendu parler des « taupes » de la Guerre civile espagnole auparavant.  Ils ont décidé de montrer le confinement de l’intérieur mais aussi de centrer le scénario sur l’évolution des rapports dans le couple. Les sentiments des héros ont été au centre de leurs préoccupations car ils trouvaient passionnant de montrer comment un homme enfermé et une femme qui constitue son lien avec l’extérieur peuvent se comporter. 

 Les réalisateurs ont  choisi de réaliser le film en trio pour des problèmes de logistique, confiants de pouvoir y parvenir parce qu’ils collaborent depuis de nombreuses années. Ils se sont interrogé sur la notion d’héroïsme, l’un des thèmes qui les passionnait dans le film. Higinio, leur protagoniste est-il un héros ou un lâche ? C’est au spectateur de se faire son opinion mais les cinéastes se sont intéressé à la peur qui l’habite au point qu’il choisit de se terrer pendant trois décennies. Le chef-opérateur Javi Aguirre Erauso a suivi la fuite du personnage caméra à l’épaule afin de faire ressentir sa terreur face aux franquistes. Pour les cinéastes, cette séquence qui arrive très tôt dans le film, devait aider à comprendre la réaction de cet homme traqué qui choisit de faire de la résistance passive plutôt que de combattre. Higinio voit la vie depuis sa cachette et imagine ce qui se déroule au moyen du son. 

Les cinéastes ont aussi travaillé la lumière de façon à rendre réaliste la cachette du héros. La lumière vient le plus souvent d’une  trou ou d’une fente par lesquels le reclus peut voir le monde réduit qui l’entoure. Comme Higinio passe trente-trois ans enfermé, ils ont dû avoir recours à de nombreuse ellipses pour marquer le passage du temps. Ils ont souhaité éviter des effets musicaux et ont préféré un système de chapitres dont chaque définition permet d’installer l’atmosphère de la scène à venir et de réfléchir à la séquence précédente. Ils ont aussi joué sur la notion de durée, certaines ellipses ne couvrant qu’une période de quelques jours alors que d’autres sautent plusieurs années. On voit Higinio se transformer en version rabougrie de lui-même face un monde qui évolue sans lui.

Je n’arrive pas à savoir si ce film reflète vraiment cette époque terrible qui a été le franquisme. Mes grands-parents, mes parents me l’ont raconté et j’ai vu dans leurs yeux la même peur que dans les yeux de cet acteur énorme qui est Antonio de la Torre Martin. ...

Beaucoup de spectateurs d'Une vie secrète pointent du doigt une longueur excessive du film et une certaine répétition narrative. Il est facile de leur rétorquer que traiter d'une (in)action de plus de trois décennies demande plus que 90 minutes, même avec des ellipses, et ...

Le film entre dans le vif dès les premières minutes qui crée une immersion directe au plus près du danger et donc de la peur qui ne va plus jamais quitter Higinio. Ca tombe bien car la peur est le thème central du film. Mais la vraie force du récit réside dans toute sa dimension ...