GOUTTE D'OR

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Ramsès tient un cabinet de voyance à la Goutte-d’Or, à Paris. Habile et manipulateur, il a mis sur pied un solide commerce de la consolation. L’arrivée d’enfants des rues, aussi dangereux qu’insaisissables, vient perturber l’équilibre de son commerce et de tout le quartier. Jusqu’au jour où Ramsès va avoir une réelle vision. Tel est le synopsis du film Goutte d’or, écrit et réalisé par Clément Cogitore, avec Karim Leklou dans le rôle principal.

A l’origine du film, l’envie de l’auteur-réalisateur de s’éloigner des grands espaces qu’il avait filmés dans ses deux films précédents, Ni le ciel ni la terre et Braguino et sa volonté de se confronter à l’espace urbain. Précisément dans les quartiers parisiens de la Goutte-d’Or et de Barbès, quartiers dans lesquels il a longtemps habité. Et Clément Cogitore d’argumenter : « Pour moi, un film consiste avant tout à se brancher à un endroit du monde et se demander ce que l’on capte de l’énergie de ce lieu-là, à ce moment-là. »

L’autre motivation initiale du film, c’est assurément le désir de montrer une réalité forte de ce quartier : le milieu des marabouts et autres médiums avec ses règles et ses escroqueries en tous genres. Mais également avec ses dimensions consolatrices et thérapeutiques pour les clients qui y font appel au quotidien. « Raconter ce milieu, ajoute Clément Cogitore, était aussi pour moi une manière d’interroger ce qui est à l’oeuvre dans mon travail qui lui aussi procède du récit, et interroge cette nécessité de se raconter autant d’histoires. »

 
Dans le même genre vous pouvez trouver ELMER GANTRY, LE CHARLATAN (Le film de Richard Brooks dresse comme celui de Clément Cogitore, le portrait d'un manipulateur hors pair.) ou encore L 627 (Le film de Bertrand Tavernier se déroule dans ce même quartier de la Goutte d'Or en proie à la délinquance et aux tensions sociales).

Est-il bon ? Est-il mauvais ? Clément Cogitore a choisi de ne pas choisir pour faire le portrait de Ramsès, le médium qu’incarne Karim Leklou. Certes, d’un strict point de vue moral, il s’agit bel et bien d’un escroc condamnable. Mais sa fonction est tout autant consolatrice et soignante. Le personnage lui-même semble ne pas saisir toute la complexité de ce qu’il fait et met en branle chez ses clients. Il joue d’ailleurs sur les deux tableaux et reste jusqu’au bout un escroc sympathique. A chaque spectateur ensuite de se faire sa propre opinion.

Clément Cogitore ne cache pas qu’il s’est beaucoup documenté sur les médiums pour écrire le scénario de son film mais qu’il a souvent été déçu par la médiocrité et la banalité de leurs embrouilles qu’il n’hésite pas à décrire comme « grosses et visibles ». Pour inventer son personnage, il a donc fait confiance à la fiction en prenant appui sur une dimension très actuelle et très vivace : l’identité numérique de chacun et l’utilisation frauduleuse que l’on peut en faire aisément.

C’est assurément par souci de vraisemblance que Clément Cogitore, avec l’aide de sa directrice de casting Tatiana Vialle, a choisi de bâtir un casting très majoritairement composé d’acteurs peu connus ou non professionnels : « J’adore filmer des visages pas ou rarement filmés, raconte-t-il ainsi, et confronter professionnels et non professionnels ».