AQUARIUS

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La France faisant partie des pays fiers de leur cinématographie, nous faisons souvent fête à des films de chez nous autant qu’aux blockbusters venus d’Hollywood. Mais nous ne laissons que peu de place dans notre imaginaire cinéphile à ces films qui ne sont ni français ni américains. Pourtant ces "ni-ni" sont parfois superbes. Pour preuve cet Aquarius brésilien, un chef-d’œuvre.

Et pourtant c’est un film qui ne roule pas des mécaniques, il s’impose à nous en douceur. A l’instar du personnage central, Clara, la soixantaine lumineuse dont on ne découvre les tracas que peu à peu. Appartenant à la bourgeoisie aisée de Recife, elle se découvre une âme rebelle quand un promoteur agressif tente de lui faire quitter l’appartement où reposent tous ses souvenirs.

Si tout est vu à travers les yeux de notre héroïne, les sentiments que porte le film sont universels. Et si nous n’habitons pas Recife - c’est du moins le cas de la majorité d’entre nous -, nous ne pouvons pas ne pas être touchés par cette femme qui perd peu à peu prise face à un monde violent, impuissante devant le temps qui passe. Au passage le film livre en catimini quelques réflexions sur la corruption des élites, la morgue des classes possédantes et les retombées de la mondialisation… Pas moins.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver JAMAIS PLUS TOUJOURS (C'est un film sur la permanence des souvenirs) ou encore LE FLEUVE SAUVAGE (Une vieille femme, qui refuse d'abandonner sa maison, fait de la résistance).

Mais qui est donc le signataire du film ? Il se nomme Kleber Mendonça Filho. Après avoir été critique, ingénieur du son et scénariste, notre homme a craqué : le démon de la réalisation le titillait méchamment. Après une belle série de courts métrages, souvent remarqués dans les festivals, il est passé au long en 2012, avec Les Bruits de Recife. Un premier film de fort belle facture, à la construction savante. Aquarius n’est que son second long métrage… Mais sa reconnaissance est mondiale. Il faut dire que le film était en compétition au Festival de Cannes 2016, et qu’il est resté l’un des favoris de beaucoup pour la Palme d’or, avant de repartir bredouille, laissant à Ken Loach le soin de fustiger l’égoïsme du monde.

D’une certaine manière, mais sans doute de manière moins frontale que Moi, Daniel Blake, Aquarius est une belle dénonciation d’une société qui part à vau-l’eau, qui elle aussi est grignotée par les termites de l’argent fou. C’est d’ailleurs l’une des richesses du film que de maintenir un parallèle entre la déchéance de son héroïne et celle de l’appartement qui l’abrite. Le réalisateur a le talent rare de savoir marier les contraires, son cinéma empruntant au fantastique sans jamais rien lâcher de son orientation presque documentaire. Son regard est affuté, navigant entre l’ethnologie sociale et une attention particulière aux individus, il ne passe rien à personne, pas même à Clara dont sa caméra est pourtant amoureuse.

Il faut dire que notre héroïne est incarnée par Sonia Braga, la plus belle de toutes les comédiennes brésiliennes, sexagénaire à l’incroyable carrière. Qui a débuté au cinéma dans les années 70, alors que le Brésil était encore une dictature militaire. Mais sa liberté, sa sensualité ont peut-être, qui sait, contribué à décoincer la société brésilienne quand est sorti Dona Flor et ses deux amants, avant que le comédienne se fasse une renommée mondiale avec Le Baiser de la femme-araignée. Depuis lors elle n’a cessé de tourner. Mais peut-être se souvient-elle que c’est dans la version carioca de Hair qu’elle a débuté. La comédie musicale libertaire qui célébrait l’âge du Verseau, "the age of Aquarius". Le film de Mendonça Filho est d’une certaine manière un retour à la case départ…

L’ambition d’Aquarius relève d’une double approche, le film se donnant simultanément comme le portrait d’un espace (un appartement situé en bord de mer, à Recife, au Brésil) et d’un corps (Clara, l’habitante des lieux), ou, plus exactement, de leur échange – ...

Meilleur film de la compétition vu pour l'instant dans l'édition cannoise 2016, Aquarius donne à l'année cinéma une saveur assez inattendue. Bien plus fictionnel que son précédent long-métrage qui reliait plusieurs histoires de voisinages, ce nouveau film très balnéaire ...

Je fais partie des rares spectateurs français qui ont un rapport particulier avec "Aquarius", voire avec le cinéma de Mendonça Fillho en général. C'est que j'ai habité pendant près de trois ans à quelques centaines de mètres de son edificio Aquarius, et du front de mer ...