L'AMI DE LA FAMILLE

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Geremia n'est pas qu'un tailleur. Il vit surtout de ses services d'usurier lui permettant de devenir aussi nécéssaire que craint par les nombreuses personnes à qui il prête de l'argent. Cette position de force va changer quand un de ses clients habituels à recours à ses services pour financer le mariage de sa fille, dont Geremia, vieillard repoussant, tombe fou amoureux...

Avec L'ami de la famille, Paolo Sorrentino prolonge les thèmes des Conséquences de l'amour, son film précédent. Les thèmes sont les mêmes : le désir, la frustration, la cupidité, mais cette fois-ci pour une comédie de moeurs renouant avec l'esprit sardonique du cinéma italien des années 70. Il nourrit une revisite incisive et provocante de La belle et la bête, qui évacue un parcours de séduction pour parler de corruption morale.

 
Pour autant, L'ami de la famille espère toujours ne pas virer au noir, par son atmosphère très solaire où le portrait d'une possible rédemption pour cet usurier. Dans un premier temps des plus grinçantes, cette fable sur les méfaits de l'amour de l'argent rend une surprenante monnaie de sa pièce en s'avérant être généreusement crève-coeur.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver L'ÉTRANGE MONSIEUR PEPPINO (Une autre histoire d'amour à l'italienne sur un ton grinçant.) ou encore DOGMAN (Tout comme L'ami de la famille, Dogman fait le lien entre banlieue italienne et cour des miracles autour d'un marginal.).

Comme souvent dans le cinéma italien, l'endroit où se déroule l'action de L'ami de la famille est une composante importante : Sorrentino a choisi de tourner dans l'Agronpontino, cette banlieue de Rome qui fut historiquement un terrain marécageux, avant que le régime de Mussolini décide de l'assécher pour le rendre cultivable et habitable, sans pour autant empêcher des maladies comme la malaria de continuer à proliférer. Soit le sol métaphorique idéal pour installer une sphère de personnages contaminés par un rapport maladif à l'argent, en premier lieu Geremia, l'usurier faisant tourner ce petit monde à la baguette. 

Pour l'interpréter, Sorrentino a voulu jouer sur les contrastes en allant chercher Giacomo Rizzo, acteur dans le creux de la vague malgré une carrière l'ayant mené de Pasolini à Bertolucci avant de devenir à la fin des années 70, la figure de proue d'une salve de très populaires comédies égrillardes. Pour le réalisateur, Rizzo était le choix idéal pour marquer le ton voulu pour L'ami de la famille, caustique mais se rapprochant d'une certaine bouffonnerie, pour se rapprocher de celui de Affreux sales et méchants.

Si le décapant classique d'Ettore Scola est la référence première de L'ami de la famille, Sorrentino s'est pourtant appliqué à s'en éloigner formellement. Dès la séquence d'ouverture, dévoilant progressivement une vieille nonne ensablée jusqu'au cou sur une plage très ensoleillées alors que d'athlétiques jeunes gens jouent au volley-ball, le ton au son du My lady story, langoureuse chanson d'Anthony & the Johnsons, ce film chasse le naturalisme. Une volonté amplifiée par le travail du chef opérateur Luca Bigazzi, à qui Sorrentino demandera de s'inspirer de certains tableaux de Van Gogh ou de De Chirico pour que le visuel du film corresponde aux difformités morales des personnages.

Vu après Les conséquences de l'amour, Il Divo et This Must be the place, ce film a fini de me démontrer toute la cohérence interne de la filmographie de Paolo Sorrentino. Comme Titta di Girolamo, Giullio Andreotti et Cheyenne, Geremia Coeur-d'or est un personnage à part, de ...

Paolo Sorrentino est décidemment l'un des cinéastes les plus intelligents et inventifs du moment. Chacun de ses films est pour moi un chef d'œuvre d'humanité, d'une acuité de réalisation et de direction d'acteurs remarquable. Chacun de ses films se focalise sur une personnalité ...