PLEIN SUD

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La femme fatale c’est d’abord celle qui vous détruit, pour qui l’on s’avilit. Surtout si elle vous a choisi au hasard dans la rue. Etre la bonne fortune d’une beauté sensuelle quand on mène une vie bien rangée, n’est-ce pas vertigineux ?

Patrick Dewaere incarne le petit prof, ce premier venu que la belle Clio Goldsmith met dans son lit et, le film qui raconte cette fugue, est sorti en 1981 : c’est « Plein Sud ».

Il s’agit d’une comédie dramatique et quelque peu fantasque, signée de Luc Béraud, à une époque heureuse où l’on prenait la route pour vivre d’amour, d’alcool et de débauche. La preuve.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LOST IN TRANSLATION (Un acteur vieillissant et désabusé et une jeune femme qui se croisent dans un hôtel luxueux mais impersonnel. A l'orée d'une possible nouvelle vie, deux êtres perdus qui se sont trouvés, peut-être dans un pays lointain aux rituels bizarres. Un grand film délicat et drôle de Sofia Coppola sur le charme de l'étrange étranger.) ou encore LE PREMIER VENU (Aimer vite, aimer son propre amour, c'est le projet d'une jeune femme qui ne veut pas perdre de temps. Elle fait confiance au hasard qui, pour elle, jette son dévolu sur un petit jeune homme. Il est délinquant et vit un peu au milieu de nulle part. Mais l'amour n'est-il pas aveugle? Un Doillon en roue libre.).

Plein Sud a un ton surréaliste qui n’est pas sans rappeler le Bunuel du « Charme discret de la bourgeoisie » ou « Cet obscur objet du désir » qui lui sont contemporains. Il est imprégné de ferveur érotique à une époque où la libéralisation des moeurs a ouvert les grandes salles aux films pornos. L’amour est libre et c’est un mode de vie. 

C’est aussi que Luc Béraud a fait ses classes comme assistant auprès de cinéastes préoccupés par le désir, Jean Eustache, Claude Miller ou Alain Robbe-Grillet. C’est d’ailleurs Claude Miller, cinéaste de « La meilleure façon de marcher », à l’époque écrit par Béraud, qui a en partie écrit le scénario de Plein Sud. Un échange de bons procédés entre deux amis fidèles.

La belle Clio Goldsmith a ce charme hippie des jeunes filles, cheveux bouclés, pulpeuse un peu comme la Maria Schneider du Tango à Paris ou de Profession reporter. Elle aura une carrière d’étoile filante traînant pendant une dizaine de rôles sa beauté, de fille perdue, en femme fatale chez Lattuada, Bolognini ou Arcady. Le film eut un destin un peu maudit. Il désorienta le public. Il faut dire que la production avait aussi imposé un  montage contre l’avis du cinéaste. Mais peut-on oublier une œuvre singulière où Jeanne Moreau, Guy Marchand et Pierre Dux s’engouffrent dans le sillage de Patrick Dewaere ?