BANG GANG

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Bang Gang n'est pas un teen-movie comme les autres. Son titre, chamboulement de Gang Bang, nom d'une pratique sexuelle dit d'emblée son envie de renverser les choses. Eva Husson ne veut pas raviver le parfum de scandale d'un fait divers – un village découvrant que ses ados s'y adonnaient à des partouzes. Plutôt recherche ce qu'il dit d'une quête du collectif, de l'émancipation mais aussi de la question d'une education sentimentale dans un monde moderne sursexualisé.

Bang Gang est donc un film singulier, sorte de revisite ultra-sensuelle de jeux adolescents façon « action ou vérité » poussé à ses limites. Entre leçon de provocation et de philosophie (le film s'ouvre sur une citation de Jung) pour ausculter l'essence d'une jeunesse contemporaine. Rien de racoleur ni de moralisateur pour autant, Husson filmant les corps sans esprit de voyeurisme ni d'érotisation.

Et si Bang Gang reste un film cru, c'est à l'image de son époque comme de ses personnages, bien plus juste qu'habituellement :  loin du propos stéréotypé sur la perte d'innocence, ces ados-là sont, à l'instar de ceux que l'on peut croiser chez Larry Clark, conscients de leurs actes, Husson réussissant par cette écriture un film bien plus trouble dans sa vision de l'intime que dans celle de la sexualité.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver KEN PARK (Parce que les ados des films de Larry Clarke ont comme ceux de "Bang Gang" perdu leurs repères et développent des comportements à risque.) ou encore HELL (Parce que cette adaptation du roman à scandale de Lolita Pille décrit les excès de la jeunesse dorée parisienne, entre drogue, fête et sexe.).

Bang Gang s'inspire d'un fait divers ayant eu lieu aux USA en 1999. Intriguée, Eva Husson se lance dans des recherches pour découvrir d'autres faits similaires en Allemagne, Belgique ou même en France. De quoi la conforter dans l'idée d'une universalité des nouveaux modes d'exploration de la sexualité par la jeunesse, quel que soit son pays. Elle se manifestera par un titre – au complet : Bang Gang (Une histoire d'amour moderne)- et un cadre particuliers : pas de définition géographique mais plutôt un moment particulier, celui d'une canicule  étouffante, jusqu'à la sensation de fonte globale. Tout d'ailleurs y déraille, jusqu'aux trains dont les accidents sont régulièrement mentionnés par des flashs radios. Bang Gang c'est aussi le récit d'un possible dernier été du monde.

Pour autant qu'il s'accroche à un groupe, Bang gang montre des personnages face à une solitude intérieure. Un reflet de la propre adolescence d'Husson, tentant de s'affranchir de la sienne en se rapprochant de bandes où elle espérait s'intégrer. De même la liberté vis-à-vis des corps, du manque d'inhibitions des adolescents du film fera écho aux étés passés  par la réalisatrice, au même âge, sur les plages nudistes espagnoles. Bang Gang ne se voulant pas uniquement témoignage des mœurs de l'époque contemporaine. Husson revendique aussi comme influence, ses lectures de grands auteurs romantiques, comme Stendhal, voulant retrouver dans son film, la même force de l'exploration des sentiments.

La part subversive de Bang Gang ne se retrouve plus dès lors dans son regard sur la sexualité, mais dans celui sur la féminité, Husson ayant fait le choix de donner ce point de vue au film, et donner à réfléchir sur un inconscient du patriarcat jusque dans le culturel : peu de films mettent en scène des femmes assumant leur sexualité. Et quand c'est le cas, généralement pour s'en retrouver punies ou condamnées. Paradoxalement, Husson confesse que les scènes qui l'ont mis le plus mal à l'aise lors du tournage, ont été celles d'orgies....

Bang Gang c'est le regard de l'adolescent sur son corps, la découverte d'une sexualité nouvelle et l'affirmation de soi dans un monde en constante représentation de lui-même. L'histoire est vécue à la manière d'un voyage initiatique aux répercussions quelques peu violentes ...

Emmené par la bande originale de White Sea et de sa musique électronique fluide et hypnotique, Bang Gang nous entraîne dans les aventures relationnelles d'une bande d'amis lycéens habitant un quartier pavillonnaire du sud-ouest, non loin de la mer. D'une caméra très souple ...

Non, bien sûr, ce film ne cherche pas à refléter la réalité : j'ai eu 16 ans et je n'ai pas le souvenir d'avoir jamais entendu parler de joyeuses partouzes enfumées où tous les corps se dénudent en groupe sans la moindre hésitation ou le moindre complexe. Eva Husson ...