UN AUTOMNE À GREAT YARMOUTH

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Cet avertissement avant tout : si vous cherchez un joli film familial pour passer un moment paisible, ce qui suit n’est pas pour vous ! « Un automne à Great Yarmouth » va au contraire vous plonger dans les recoins les plus sordides d’une petite station balnéaire du Norfolk en Grande Bretagne à la veille du Brexit.  

Vous allez y faire la connaissance de Tânia, chargée par l’usine de volailles du coin d’organiser le travail mais aussi le logement d’ouvriers portugais arrivés illégalement. Entre la dureté de l’abattoir et la précarité de leurs conditions d’hébergement, Tânia gère le quotidien de main de maître tout en chérissant le rêve d’une autre vie : ouvrir un hôtel pour personnes âgées...  

Voilà un film tout sauf manichéen : celui d’une femme, (magnifiquement incarnée par Beatriz Batarda), beaucoup plus complexe qu’elle ne le laisse paraître. Mieux, après la détestation du début, vous allez même apprendre à la trouver attachante ! 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LES ENGAGES (Que faire face à l'arrive de ceux qui risquent leur vie pour venir trouver chez nous un avenir meilleur ? les aider ou les exploiter ?) ou encore THE OLD OAK (Une petite ville anglaise autrefois prospère... Des migrants qui bouleversent un équilibre très fragile... Deux odes à la tolérance.).

A l’origine était le verbe... Le film de Marco Martins a d’abord été une pièce de théâtre écrite par lui-même, née de son séjour à Great Yarmouth. Cet ancien lieu de villégiature de la côte anglaise fut autrefois un lieu très prisé de la classe moyenne qui venait y passer ses weekends et ses vacances. Mais les crises sociales à répétition l’ont peu à peu transformée en cité fantôme ou l’auteur-réalisateur croise des migrants portugais, embauchés comme quasi-esclaves dans les usines avoisinantes... Il a l’idée d’une pièce de théâtre qu’il prolongera du film que vous venez de voir, percevant dans cette cruelle fable sociale le reflet terrible d’un capitalisme sans scrupules. Martins s’inscrit en cela dans la continuité de glorieux aînés, au premier rang desquels Ken Loach évidemment.  

L’œuvre du réalisateur britannique, (deux fois palmé d’Or au Festival de Cannes), regorge de ces villes autrefois prospères, réduites désormais à des enfilades de rues aux boutiques closes et aux maisons décrépies... « The old oak », le film de Loach sorti en 2023, raconte comment un vieux pub en perte de vitesse va devenir le refuge d’un groupe de migrants, déclenchant le rejet d’une partie de la population... « Moi Daniel Blake », « Sorry we missed you » et tant d’autres nous plongent avec une cruelle tendresse dans les méandres d’une société anglaise fracassée, d’où émerge parfois le cœur et la solidarité...  

Pour comprendre comment des agglomérations jadis florissantes sont peu à peu tombées en désuétude, vous pouvez également voir ou revoir « Empire of light » de Sam Mendès sorti lui aussi en 2023, qui retrace le quotidien d’un vœux cinéma du sud de l’Angleterre au tournant des années 80, durant la période du tachérisme et de l’implosion sociale du pays. On y suit la vie de tous les jours des employés, assistant aux projections dans la salle avant de regarder leur nation se déliter dans la rue. Olivia Coleman, Micheal Ward, Toby Jones ou Colin Firth illuminent cette œuvre sombre et superbe... 

Great Yarmouth est une station balnéaire du comté de Norfolk, ouvrant sur la mer du Nord au sud-est de l’Angleterre, et autrefois très courue par la classe moyenne britannique. De fait, le titre, Un Automne à Great Yarmouth, pourrait laisser entrevoir une villégiature ...