I... COMME ICARE

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Henri Verneuil a 59 ans et n’a pas tourné depuis trois longues années lorsque, le 14 mai 1979, il entame, à Cergy-Pontoise, la réalisation de son trentième long métrage, I comme Icare, allusion au  héros de la mythologie dont les ailes, collées à la cire sur son dos, se détachèrent lorsqu’il s’approcha trop près du soleil. Vous voilà prévenus, à trop vouloir s'approcher de la vérité, on finit par se brûler les ailes !

C’est ce que va découvrir le procureur d’un pays imaginaire (Yves Montand), enquêtant sur l’assassinat de son président, alors que celui-ci, récemment réélu, saluait une foule nombreuse et en liesse. Ecrit par Henri Verneuil et Didier Decoin, le scénario de ce film n’est pas sans rappeler l’assassinat du président Kennedy ; le premier suspect se nommant même Daslow, évident anagramme de Oswald (Lee Harvey, de son petit nom).

Comme il l’avait déjà fait pour la Bataille de San Sebastian, le Clan des Siciliens, le Casse, le Serpent et Peur sur la ville, Henri Verneuil confia la bande originale de son nouveau film au prolifique compositeur romain : Ennio Morricone. Et, pour donner la réplique à Montand, il réunit une fort solide distribution, dans laquelle vous reconnaîtrez notamment : Roland Blanche, Marcel Maréchal, Roger Planchon, Pierre Vernier et même... Brigitte Lahaie.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver ANGLES D’ATTAQUE (2008) (Enquête sur une tentative d’assassinat visant le Présidant Ashton. Là aussi, un cinéaste amateur a filmé la scène...) ou encore BENJAMIN GATES ET LE LIVRE SECRET (2007) (De nos jours, Benjamin enquête, lui aussi, sur l’assassinat d’un président, tué il y a bien longtemps : Abraham Lincoln !).

Si trois années s’étaient écoulées entre la sortie de son dernier film, le Corps de mon ennemi, en octobre 1976, et I comme Icare, en décembre 1979, c’est que le récit de cette machination donna à Henri Verneuil pas mal de fil à retordre. C’est, en effet, en 1973, après le tournage du Serpent, avec Yul Brynner et Henry Fonda, que le cinéaste découvrit "l’expérience de Milgram", du nom de ce scientifique américain, Stanley Milgram, auteur de travaux sur la soumission à l’autorité. Il en résultait que 25% des personnes soumises à une autorité accepte d’aller jusqu’à tuer. L’expérience, qu’il devait reconstituer dans son film, donna à Verneuil l’idée d’une première histoire, qu’il abandonna assez vite pour se consacrer à Peur sur la ville. Revenant à Milgram, il écrivit une deuxième histoire, qu’il abandonna de même, au profit, cette fois, du Corps de mon ennemi.

Le bon scénario fut le troisième, écrit en étroite collaboration avec Didier Decoin, durant sept mois, "dimanches et jours fériés compris", dira Decoin, Verneuil jugeant leur collaboration : "fraternelle et étroite". Même si l’affaire Kennedy leur servit de fil conducteur, jamais les deux hommes pensèrent intituler leur film : K... comme Kennedy, "parce qu’il ne s’agit pas de la mort de Kennedy, expliqua le cinéaste. La mort du président et l’enquête que va mener le Procureur n’est que le support dramatique pour rejoindre le thème fascinant de Stanley Milgram." C’est ce scénario que Verneuil fit lire à Yves Montand, "le seul nom qui s’est imposé tout de suite pour le rôle principal", assurera-t-il plus tard. A peine rescapé du sombre drame de Costa-Gavras, Clair de Femme, avec Romy Schneider, l’acteur accepta tout de suite le rôle, devenant même coproducteur du film, avec Verneuil. "Passionnante au niveau de l’anecdote et riche en émotion dramatique [...], l’histoire en vaut la peine", expliquera le comédien-producteur.

Cet avis fut partagé par une partie de la critique. Il s’agit du "meilleur film d’Henri Verneuil", s’extasia François Chalais dans le Figaro-Magazine, "mené à un rythme américainʺ, poursuivit Jean Rochereau dans la Croix. Bref, "un bon spectacle pour les fêtes", conclut Annie Coppermann dans les Echos. D’autres seront moins enthousiastes. Quand Jean-Paul Grousset dans le Canard enchaîné ravale la superproduction au rang d’"un télé-feuilleton américain de série B", Jacques Zimmer, dans la Revue du cinéma, se demande comment "un professionnel aussi pointu" a pu se laisser aller à tourner un film "tout à la fois ennuyeux et inefficace". "Les invraisemblances du scénario, et les maladresses de sa mise en scène, écrit de son côté Jean-Luc Douin dans Télérama, vont de pair avec une étrange obstination à ne jamais être crédible." Et pourtant, présidé par Marcel Julian, le Prix Louis Lumière fut attribué à I comme Icare, par six voix contre quatre pour le Pull-over rouge de Michel Drach.

Un état imaginaire, l'assassinat d'un président, un procureur opiniâtre qui découvre une machination et qui s'approche trop près de la vérité... comme le disait Henri Verneuil, le titre du film a été choisi en fonction de la légende d'Icare, et l'idée de son film est ...

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