INFIDELITES

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Jean-François Davy se fait connaître au début des années soixante-dix par une trilogie de comédies érotiques assez joyeuses. Grand admirateur de l’œuvre d’Ingmar Bergman, dont il sera plus tard le distributeur vidéo attitré, il sait aussi privilégier une veine plus dramatique axée, comme chez le maître suédois, sur les problèmes du couple et l’érosion du désir. Des scénarios plus graves sont aussi pour lui l’occasion d’une introspection presque autobiographique, inspirée de ses propres difficultés. Cette dimension personnelle est renforcée par le choix du décor, la grande propriété normande de Champenard, lieu de tournage de Bananes mécaniques et de nombreux pornos qu’il produira par la suite et qui n’était autre que sa propre maison de campagne.

Ainsi donc, après sept ans de mariage, le couple d’Infidélités – aussi baptisé Le Désir – s’essouffle et décide d’inviter pour le week-end, lui sa maîtresse, elle son amant ainsi qu’un deuxième couple. Autant de protagonistes, surpris par l’orage, pour un Sourires d’une nuit d’été en version soft, tandis qu’un trio de jeunes hippies, sexuellement libéré, rappelle l’érotisme potache de Bananes mécaniques.

« L’ambition de moraliste va-t-elle plaire aux spectateurs de salles spécialisées ?» s’interrogeait un critique à la sortie du film, en août 1975, au moment même où Exhibition, documentaire hard de Davy, triomphait depuis plus d’un mois. Ecrasé par la vague porno du cinéma français, cette comédie douce-amère, aux étreintes simulées, pudiquement filmées, sera un échec commercial qu’il convient désormais de réévaluer.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LES NOCES DE PORCELAINE ou encore SOURIRES D'UNE NUIT D'ÉTÉ .

Infidélités est coécrit par André Ruellan, ancien médecin devenu romancier dans les années cinquante, écrivant notamment sous le pseudonyme de Kurt Steiner de nombreux récits d’épouvante pour la collection Angoisse du Fleuve Noir, des romans d’anticipation ainsi qu’un Manuel du savoir-mourir illustré par Roland Topor. Davy adapte l’un de ses romans fantastiques, Le Seuil du vide, en 1971. Au cinéma, il travaille comme scénariste avec Pierre Richard, Alain Jessua et surtout Jean-Pierre Mocky, avec lequel il écrit en 1973 L’Ombre d’une chance, sa première incursion, avant Infidélités, dans le domaine de la comédie dramatique érotisante.

Pour servir ce scénario tout en finesse psychologique, Jean-François Davy fait appel à quelques-unes des plus belles starlettes du cinéma érotique naissant. Certaines connaissent une carrière éclair, le temps de quelques titres comme Orlane Paquin et Natacha Karenoff. Le rôle principal d’Isabelle est tenu par Albane Navizet qui débute en 1964 dans Et la femme créa l’amour et qu’on revoit dans La Route de Salina de Georges Lautner, L’Amour à la bouche, premier film de Gérard Kikoïne et Histoire d’O de Just Jaeckin. Cet ancien modèle a abandonné le cinéma à la fin des années soixante-dix pour devenir photographe. La rousse Virginie Vignon, qui interprète Prune, s’est spécialisée dans les personnages de soubrettes au franc parler, prenant son service aussi bien dans des comédies avec Louis de Funès comme Hibernatus qu’auprès de Daniel Prévost dans Y’a un os dans la moulinette. Mais sa présence piquante égaye principalement des films érotiques, notamment ceux de Michel Lemoine qui la dirige dans Les Désaxées et d’Alain Robbe-Grillet qui la fait kidnapper dans Le Jeu avec le feu. 

Quant aux deux hippies sans complexe, les amateurs reconnaîtront Mona Heftre et Joëlle Cœur. La première avait débuté comme strip-teaseuse de baraque foraine avant de devenir l’égérie du Grand Magic Circus de Jérôme Savary. A cette époque, sous le nom de « Mona Mour », elle apparaît dans La Messe dorée, Change pas de main, La Fille du garde-barrière et Liaisons perverses. Elle poursuit aujourd’hui son parcours de comédienne et de chanteuse et a joué récemment dans le Capitaine Achab de Philippe Ramos. On a en revanche perdu la trace de Joëlle Cœur qui fut l’une des meilleures actrices soft de sa génération. Comme Mona, elle fut pin-up pour couvertures de polars et tourna aussi bien pour José Benazeraf, Jean-Marie Pallardy, Michel Lemoine qu’Alain Robbe-Grillet. Elle  incarna surtout Tina, la naufrageuse des Démoniaques, de Jean Rollin, qu’elle charge d’un érotisme pervers, lors d’une scène d’onanisme au bord d’une plage qui reste dans les mémoires des érotomanes.