JE SUIS ANNEMARIE SCHWARZENBACH

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Annemarie Schwarzenbach est une romancière et photographe suisse-allemande, lesbienne morphinomane et antinazie, née en 1908 à Zurick, morte prématurément à 34 ans, en 1942. Je suis Annemarie Schwarzenbach est un film de fiction de Véronique Aubouy qui évoque cette forte personnalité, à laquelle Carson McCullers, très amoureuse, dédia Reflets dans un œil d’or. 

Loin d’un traditionnel biopic, le film que vous allez voir est un montage des nombreuses séances de casting, organisées et même construites sous la forme d’une fiction, dans le but de trouver l’interprète idéal, celle ou celui qui saura, le mieux, incarner cette femme aux facettes si multiples.   

Au cours de ces castings, la réalisatrice lance quelques thématiques liées à l’existence d’Annemarie Schwarzenbach – l’amour, la drogue, le voyage, la politique, l’écriture, l’amitié –, autant de propositions permettant à ces jeunes comédiennes (et même comédiens) de construire un portrait polymorphe de leur modèle, en mêlant leur propre trajectoire à la sienne. Cette multiplicité d’interprètes était, pour Véronique Aubouy, le meilleur moyen de faire le portrait de cette romancière des années 1930, tout en évoquant une autre génération de jeunes femmes, celles du début des années 2000.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver ANNEMARIE SCHWARZENBACH DUENDE (2012) (Biographie de la sulfureuse intellectuelle, cette fois incarnée par une seule comédienne, l’artiste plasticienne et polonaise Agata Mocarska.) ou encore MAESTRO (2014) (Henri (Pio Marmaï) se rend chez le pape du cinéma d’auteur (Michael Lonsdale) qui cherche un comédien pour son prochain film.).

« Véronique Aubouy, réalisatrice, cherche jeunes actrices (ou même acteurs), entre 18 et 23 ans, pour interpréter le rôle principal de son long métrage : Inconsolable. » Tels étaient les premiers mots de la petite annonce que Véronique Aubouy fit paraître en novembre 2012. L’appel se poursuivait par une description assez précise du physique recherché : « Cheveux coupés à la garçonne [...], androgyne [...], regard absent et hypnotique [...], visage inquiet et inquiétant ». C’est ainsi qu’elle reçut chez elle de très nombreuses jeunes femmes, auxquelles elle fit lire des textes de Schwarzenbach et des extraits de son scénario mais, surtout, auxquelles elle posa des questions personnelles, voire très personnelles. « Le dévoilement de leur intimité est le prisme central de mon approche du personnage, déclara-t-elle. Il ne s’agit pas d’interpréter un rôle : elles doivent d’abord parler d’elles et se donner à chaque instant avec autant de liberté et d’intransigeance qu’Annemarie, si elles veulent obtenir le rôle. »  

Sorti relativement confidentiellement en avril 2015, Je suis Annemarie Schwarzenbach est l’un des nombreux films réalisés, depuis le début des années 1990, par Véronique Aubouy, ancienne assistante – de Laurent Heynemann et de Robert Altman notamment. Courts ou longs métrage, documentaires ou fictions, son œuvre est éclectique, elle a même signé l’un des épisodes de la série l’Instit. C’est à Cannes, en 1996, à l’occasion de la présentation de son premier documentaire, dans la section Un certain regard, qu’elle parla à un producteur de sa passion pour la sulfureuse romancière. Germanophile, elle se mit alors à dévorer toute son œuvre en version originale, avant de se rendre à la bibliothèque de Berne pour y consulter ce qui restait de ses archives, en grande partie brûlées par la mère et par la grand-mère de la défunte Annemarie. C’est alors que Véronique Aubouy écrivit Inconsolable, le scénario d’un film jamais tourné, récit de dix jours clés dans la courte existence de l’helvète icône, qu’elle compara souvent à James Dean ou à Grace Kelly ! 

C’est en 2008, à l’occasion du centenaire de sa naissance, qu’elle a l’idée d’organiser, au Centre Culturel Suisse de Paris, le casting de l’actrice principale de son futur film, toujours en projet. Chacune des douze jeunes filles présentes sur scène fut invitée à lire des extraits de son œuvres, quelques scènes du scénario et, aussi, à parler d’elle-même. Au terme de la soirée, des personnes du public vinrent voir la cinéaste en lui confiant le nom de leur interprète idéale... Évidemment, jamais la même ! « Ce soir-là, déclara plus tard Véronique Aubouy, j’avais trouvé mon film. »