POUR ELLES, 5 HISTOIRES BRÛLANTES

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Erika Lust est une jeune Suédoise trentenaire qui vit à Barcelone depuis 2000. Diplômée en sciences politiques et féministe, elle y a cofondé Lust Films, qui a pour objectif de produire des pornos pour les femmes et les couples. Elle fait donc partie de ce nouveau courant féministe qui, loin de condamner la pornographie, s’en est emparée pour en proposer sa propre conception.

Cinq Histoires Chaudes pour elle, sorti en 2007, est un programme de 5 courts métrages qui définissent une approche ludique et naturaliste. Refusant les excès et les situations trop irréalistes du porno classique qui fait souvent de la représentation sexuelle une performance de cirque, Erika Lust met en scène des personnages de la vie urbaine. Une vendeuse de magasin érotique, un jeune couple avec deux bébés, un livreur de pizza, la femme d’un footballeur… « des gens normaux » comme les définit la cinéaste. Elle cerne leur psychologie et leurs fantasmes pour nous les rendre attachants. Les séquences explicites n’en sont alors que plus intenses, comme un approfondissement de leur personnalité.

Sur le plan visuel aussi, le regard d’Erika Lust apporte un changement. Fini le gros plan gynécologique et l’obsession de tout montrer qui nécessite des postures artificielles. « Je veux du sexe-maison » dit-elle. Mouvante et sensuelle, sa caméra s’adapte aux situations, attentive aux détails : des caresses, des tétons qui se dressent de plaisir, des gémissements crédibles se mêlant à la bande musicale, des visages transportés par l’émotion. Tandis que le marché du X aime cloisonner les pratiques, Erika passe allègrement du sketch lesbien torride au jeu de domination pour couple hétéro pour finir par un très beau duo masculin filmé en noir et blanc. 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver PINK PRISON ou encore HISTOIRES DE Q .

Convaincue que les femmes ne peuvent s’intéresser au cinéma porno qu’à la condition qu’on leur présente des personnages à la psychologie bien dessinée, Erika Lust s’attache à leurs sentiments, leurs peurs et leurs envies. Un peu facile, le recours à la voix off lui permet de dessiner quelques portraits intimes. Plus astucieux est l’aparté face caméra, dans le sketch de The Good Girl, qui transforme les spectateurs en complices amusés d’une confidence.

Ce parti pris a convaincu puisque le film a reçu de nombreux prix dont le Meilleur Film de l’Année 2008 au Feminist Porn Awards de Toronto, créés en 2006 pour récompenser les films répondant à des critères très précis. Outre le fait d’avoir été conçu par une femme, Cinq Histoires Chaudes pour Elle remplissait  les autres conditions de ce prix : montrer un plaisir féminin authentique, élargir la gamme d’expressions sexuelles des femmes et défier les stéréotypes fréquents dans le porno industriel.

Nous restons cependant surpris par la résistance de certains codes très classiques, comme l’éjaculation externe, autant présente dans une vidéo Marc Dorcel que dans les scénarios d’Erika Lust. Cependant, dans le sketch SM, elle est suivie d’un détail inattendu montrant l’homme lécher un peu de son sperme avant d’embrasser amoureusement sa partenaire. Il y a aussi la jeune femme qui dit au livreur de pizza : « J’veux que tu jouisses sur mon visage comme dans les films pornos. » Cette fois Lust s’amuse de cette pratique, souvent condamnée par les féministes. Elle en dénonce ironiquement la nature cinématographique et montre comment une femme peut se l’approprier pour son plaisir.