LES TOURNESOLS SAUVAGES

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S’il n’est pas le réalisateur espagnol le plus réputé à l’international, Jaime Rosales s’est bâti une carrière qui compte dans le paysage cinématographique ibérique depuis le début des années 2000. Invité régulier des sections parallèles du Festival de Cannes, il fait surtout parti du club fermé des cinéastes récipiendaire d’un Goya du meilleur réalisateur, équivalent espagnol des César espagnol, au même titre que ses illustres pairs Pedro Almodovar et Juan Antonio Bayona. Dans un style moins fantasque, plus social, tendu, et à échelle humaine, le cinéma de Jaime Rosales a comme horizon les films de Michael Haneke.

Comme presque tous les films de Jaime Rosales, Les Tournesols sauvages est le portrait d’une femme de son temps. Agée de 22 ans, Julia est une jeune mère barcelonaise de deux enfants, qui cherche désespérément un sens à sa vie, en même temps qu’un homme avec qui la partager. Seulement, à l’époque des smartphones et des applications de rencontres, trouver un homme fidèle, attentionné et aimant est une mission semée d’embûches. Encore plus quand on travaille comme femme de ménage dans un hôtel et que l’on doit élever en parallèle une très jeune progéniture.

Découpé en trois segments pour autant d’hommes qui croiseront la route de Julia, Les Tournesols sauvages se vit comme un voyage vers la lumière pour son personnage principal. De la violence à l’indifférence, en passant par la jalousie et l’infidélité, jusqu’aux terres promises du bonheur. Derrière son vernis de drame social dur et cruel, se cache la fleur solaire promise dans le titre.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver UNE FEMME SOUS INFLUENCE (Chef d’oeuvre de John Cassavetes dans lequel Gena Rowlands joue une mère au foyer dépressive et alcoolique qui se bat avec ses démons) ou encore A PLEIN TEMPS (Un film multi-récompensé dans lequel une mère célibataire qui élève seule ses deux enfants lutte tous les jours pour aller travailler loin de chez elle).

Minimaliste dans sa mise en scène, réduite à de nombreux plans fixes et quelques panoramiques, Les Tournesols sauvages déploie toute sa maestria par sa narration elliptique, sans marqueur temporel, où les saisons passent en un battement de cil alors qu’une scène de drague ou de dispute peut s’étirer sur plusieurs minutes. C’est le style Jaime Rosales, un cinéaste économe, qui depuis les expérimentations de La Soledad en 2007 (usage récurrent du split-screen) et Un tir dans la tête en 2008 (tourné de loin, avec un téléobjectif), a fait vœu de sagesse. « Moins d’effets pour plus d’effet » pourrait être son mot d’ordre depuis maintenant 15 ans, tant le cinéma de Jaime Rosales n’a rien perdu de sa pertinence, de son intuition et de sa vivacité. Les Tournesols sauvages en est un nouvel exemple.

Le film trouve son salut dans le visage charmeur et angélique d’Anna Castillo, l’interprète aux mille facettes derrière Julia. Il faut beaucoup de talent, de courage et de don de soi pour incarner un tel personnage qui vit sa vie comme des montagnes russes : tour à tour amoureuse, euphorique, dépressive, accablée ou en proie aux larmes. On comprend pourquoi Jaime Rosales est allé offrir un tel challenge à l’actrice de 30 ans, connue en Espagne pour ses rôles dans des films populaires, des comédies ou des productions Netflix. Donner le rôle de Julia à Anna Castillo est aussi une manière pour l’actrice d’éclore et de rayonner comme les tournesols. Le personnage comme son interprète passe du bourgeon, à la fleur fanée, avant de s’ouvrir dans les derniers instants.

On en oublierait presque que d’autres acteurs chevronnés entourent Anna Castillo, comme Oriol Pla, sorte de sosie musclé de Gael Garcia Bernal, terrifiant dans le rôle du tatoué et violent Oscar. Ou encore Manolo Solo, très grand comédien ibérique passé chez Guillermo Del Toro, Victor Erice et Alejandro González Iñárritu. Comme l’interprète principale, tous se plient à la maîtrise et à la délicatesse du chef d’orchestre Jaime Rosales, réalisateur de chroniques sociales et de mœurs sans pareilles.

Ils se multiplient, ces temps-ci, les réalisateurs hommes qui se penchent avec une réelle bienveillance et un réel désir de compréhension sur les vents qui régissent les destins et les choix d’héroïnes féminines lancées dans la quête du bonheur et de son accomplissement. ...

Jaime Rosales est sûrement le réalisateur espagnol le plus sous-estimé en France.Son cinéma est en effet d'une sensibilité rare et d'une grande qualité formelle.Dans ce film, le Catalan s'attache à faire le simple portrait d'une jeune mère célibataire de ...

Julia est une nomade contemporaine, ballottée entre hommes (violents, lâches, dépassés, incertains), petits boulots, villes et désirs fugaces ou indéfinis, refoulés ou abandonnés face à la surcharge. Et ses enfants, bien sûr, chevillés au corps, et dont elle ne veut ...