AU REVOIR LE BONHEUR

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Pour faire une bonne comédie, il faut un bon contexte. Et si possible avec des accents de tragédie pour que le rire agisse par contraste. Ken Scott a choisi l'idéal : Au revoir le bonheur a pour point de départ... Des funérailles ! En l'occurrence du père de quatre fils qui se retrouvent pour disperser ses cendres. Encore faudrait-il que le frère qui était chargé de ramener l'urne, n'aie pas perdu en route la valise qui la contenait.  

Derrière ce tableau de famille endeuillée, où chacun va dire ses vérités aux autres, Au revoir le bonheur fait un revigorant portrait de la masculinité et de ses fragilités à travers ces quatre frères (un psychorigide, un nostalgique, un épicurien et un intellectuel) qui réapprennent à se découvrir.  

Et si Au revoir le bonheur n'engendre pas la tristesse, entre autres par le savoureux sens de la répartie des dialogues, sa pudique carte du tendre, renforcée par un quatuor de comédiens, collectivement récompensés par un prix d'interprétation au festival de l'Alpe d'Huez en 2022, autorise une jolie larme à l'œil devant cette thérapie familiale enlevée. 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver CEUX QUI M'AIMENT PRENDRONT LE TRAIN (Comme Au revoir le Bonheur, le film de Patrice Chéreau sonde les rapports humains lors de funérailles.) ou encore BLACKBIRD (Une autre histoire de deuil (mais cette fois-ci à venir) menant à une réunion de famille propice à vider son sac.).

Si Au revoir le bonheur explore, via les retrouvailles de quatre frères, revenus dans la maison où ils ont grandi, un retour aux sources, ce fut aussi le cas en coulisses : Ken Scott n'avait pas tourné au Québec depuis onze ans, le succès mondial de Starbuck l'ayant amené à réaliser des films aux USA ou en Europe, quand il ne supervisait pas ses multiples remakes, dont Fonzy, celui français. Originellement, le réalisateur souhaitait tourner à la Havane, mais l'interdiction de voyager due au COVID, l'a incité à rester à domicile.  

Au revoir le bonheur aura été l'occasion, en plus de revenir sur ses terres d'origines, de conforter des thèmes qui l'ont toujours travaillé, voire nourri ses cinq précédents longs-métrages : les liens familiaux évidemment, mais aussi les affres de la paternité ou l'esprit communautaire. Pour autant ce film-ci se distingue des autres, qui plaçaient des personnes lambda dans des situations hors du commun (la découverte de 533 enfants pour un donneur de sperme dans Starbuck, un simple ouvrier qui devient légendaire joueur de Hockey dans Maurice Richard...). Avec Au revoir le bonheur, Scott voulait exprimer la force des sentiments que peut contenir une situation délicate comme peut l'être un deuil, mais malgré tout ordinaire. Rien ici d'autobiographique pour autant. Travailler autour de la fratrie était même un terrain à défricher pour Scott qui, s'il est issu d'une famille nombreuse, n'a que des sœurs...  

Pour autant c'est bien l'idée de clan qui est au centre d'Au revoir le bonheur, film sous l'égide d'une citation de l'écrivaine Diane de Beausacq (« La famille est un ensemble de gens qui se défendent en bloc et s'attaquent en particulier »). Scott la tend vers une sensibilité de cinéma européenne : de son aveu même, l'influence pour ce film choral était Nous nous sommes tant aimés d'Ettore Scola, dont il a importé la tendresse comme les teintes douces-amères. 

Ce film québécois sorti en décembre, trois jours avant une nouvelle fermeture des salles injuste et arbitraire, se positionnait comme le film familial de Noël. Cette troisième fermeture aberrante lui a coupé l’herbe sous le pied et a douché les espoirs de ces producteurs. ...

C’est une réalisation de Ken Scott qui s’est déjà fait remarquer avec Starbuck et L'Extraordinaire voyage du Fakir. Au revoir le bonheur a été récompensé au Festival International du Film de Comédie de l'Alpe d'Huez 2022 avec le Prix d'Interprétation ...