Bien qu’il ne manque pas d’expérience, Arnaud Malherbe signe avec Ogre son premier long-métrage de cinéma. Il était auparavant cocréateur de la série Chef, avec Clovis Cornillac, dont il a dirigé la plupart des épisodes, scénariste et metteur en scène de la série Moloch ; il a aussi écrit et réalisé les téléfilms Belleville Story et Chambre noire (avec Jonathan Zaccaï et Armelle Deutsch). Mais Ogre a toujours été conçu comme un film de cinéma. « Il n’y a pas d’espace à la télévision pour ce type de cinéma fantastique, justifie Malherbe. C’était pour moi l’évidence que ce projet, que j’ai nourri pendant longtemps, soit envisagé pour le cinéma car j’avais envie de travailler de façon atmosphérique, et sur des sensations organiques visuellement et sur le plan sonore. » Il ajoute qu’Ogre coûte environ 2 millions d’euros – c’est donc un tout petit budget – soit le prix de deux épisodes d’une série télé environ.
Samuel Jouy explique ce qui lui a plu dans le rôle de Mathieu, le médecin : « Son ambiguïté m’a beaucoup intéressé. Comme le film est raconté du point de vue de l’enfant, pour lui, je suis l’ogre. » Et pour préparer le rôle, il explique avoir lu ‘Dr Jekyll et Mr. Hyde’ : « Je pensais bien connaître l’histoire, confie le comédien, mais ce n’était pas forcément le cas. Quand on lit ce roman, qui est assez court, c’est beaucoup plus profond et nuancé que l’image d’Épinal du gentil docteur vs la bête. Le personnage prend conscience au fur et à mesure de la bête qu’il a en lui. C’est ce que j’ai proposé à Arnaud malherbe, notamment pour les scènes de fin… » Puis, pour les scènes qu’il partage avec Ana Girardot, il travaille la notion d’emprise : « Une emprise physique, de désir, dit-il. Je trouvais ça intéressant de raconter cette manière dont quelqu’un peut être attiré irrémédiablement par l’autre. Cette prédation charnelle. »
Jusqu’à la dernière version du scénario, l’ogre n’était pas réellement décrit sur la page : « Pour moi, dit Arnaud Malherbe, c’était une masse une présence. On s’est d’ailleurs posé la question de le créer en numérique. D’une part, on s’est rendu compte que c’était une tannée, qu’on n’avait suffisamment d’argent. D’autre part, j’avais envie de quelque chose qui soit palpable, organique. » S’est ensuite posée la question d’utiliser un acteur pour « l’incarner » ou le figurer : « J’ai travaillé avec l’Atelier 69 et Olivier Afonso ; du coup, j’ai casté un comédien qu’Olivier connaissait bien. C’est aussi la nature de l’interprète qui va donner des pistes pour travailler. On a remarqué qu’il y avait une certaine correspondance avec Samuel Jouy, qui joue le médecin dans le film. Et on a essayé d’appuyer cette ressemblance. Après, c’est une question de recherches, de moulage, de design. Même s’il n’y avait rien de précis à la base, j’avais envie qu’il soit encore très humain. Une version diminuée ou salie d’un être humain. C’était pour moi plus impressionnant qu’un monstre objectivement fantastique. »