LE CHEMIN

en VOD

L’action se déroule au Cambodge, dans un monde loin de nous, silencieux, enveloppant. L’histoire est celle d’une rencontre entre une jeune Française qui se prépare à devenir religieuse et un pêcheur du cru dont la femme est en train de perdre la vie. Une rencontre basée sur peu de choses au demeurant, quelques regards, quelques paroles, une sorte de rituel forestier qui n’a pas réellement de justification, mais tout est dit sur la vie qui passe et le destin qui parfois ne cherche pas à nous caresser dans le sens du poil.

Ce qui nous touche en premier lieu dans ce film tout en douceur, c’est la parfaite adéquation entre la moiteur envoutante des lieux et l’itinéraire spirituel de la novice à laquelle Agathe Bonitzer prête ses traits. Le film ne dit rien du passé de la jeune femme ni des raisons de son engagement dans cette mission, ce qui lui permet d’échapper aux récifs de la psychologie pour mieux trouver sa place dans une approche mystique de la nature et du monde.

La Fiancée du roi, le roman de Michel Huriet, publié en 1967, dont le film est adapté, se déroule au Japon. Le tournage n’a pas été possible au pays du Soleil levant. On ne perd pas au change, bien au contraire. Le Cambodge n’est pas aussi développé que son voisin nippon, et le spirituel s’impose d’autant plus facilement. Jeanne Labrune s’est imprégnée du pays et de sa culture avant de tourner. Ses repérages l’ont conduite à Ta Om, un village reculé dont la topographie était parfaite. La plupart des religieuses du film sont d’ailleurs interprétées par des femmes du village.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver DANS LES FORÊTS DE SIBÉRIE (C'est la même confrontation d'un personnage solitaire qui se cherche en terre inconnue) ou encore THÉRÈSE (Ce sont les mêmes interrogations d'une jeune femme partagée entre sa foi et les contraintes d'un engagement religieux).

A l’heure des surenchères hollywoodiennes, alors que les superhéros triomphent sur les écrans, il est rassurant de voir qu’un film comme Le Chemin parvient encore à frayer le sien. Nous en sommes d’autant plus heureux qu’il s’agit d’un film de Jeanne Labrune, dont les films précédents ne nous ont jamais laissés indifférent, notamment ces trois fantaisies légères et satiriques que sont Ça ira mieux demain, C’est le bouquet ! et Cause toujours ! Autant de témoignages d’un mélange subtil d’ironie parfois cruelle et d’une évidente empathie de la cinéaste pour ses contemporains. Le Chemin lui a fait opérer un virage esthétique et thématique majeur : aux exercices parfois ludiques, toujours malins tournant autour de nos petites névroses quotidiennes succède ainsi un film beaucoup plus large, où les émotions sont portées par le non-dit.

La rencontre régulière de la novice et du beau Khmer bientôt veuf ouvre la piste d’une histoire d’amour. Cela aurait été une facilité. Et d’ailleurs le film trace davantage deux parcours parallèle qu’un destin commun. Mais c’est justement ce qui bouillonne dans  les esprits qui nous accroche. Les deux personnages ne s’expriment souvent que par litote, et leur relation est à l’unisson de la nature qui les enveloppe, où la vie et la mort se donnent la main. D’autant plus que si le contexte politique n’est pas rappelé en permanence nous n’oublions pas pour autant le drame du génocide perpétré par les Khmers rouges, dont la cicatrice n’est pas encore refermée. Le film est sans doute déroutant, il tarde peut-être à nous prendre par la main, mais il s’adresse moins à notre raison qu’à nos sens. Qui restent en éveil, les images et les sons nous emplissent, et c’est à regret que nous devons nous contenter d’imaginer les odeurs.

Le Chemin est un film secret, un film qui se mérite, qui avance à son rythme et ne se prive pas d’emprunter des chemins buissonniers. Si son héroïne est tentée d’entrer dans les ordres, le film n’est pas pour autant religieux, mais Jeanne Labrune développe sans aucune ambiguïté une dimension spirituelle. Et même clairement écologiste, au sens premier du terme, tant nous sommes invités à concevoir la vie comme un passage au cœur d’une nature qui nous embrasse. Le Chemin n’est évidemment de la race des blockbusters qui font courir les foules. Mais il sait accrocher le cœur de ceux qui s’ouvrent à lui, qui se retrouvent ainsi en bonne compagnie dans un endroit secret délaissé par le grand nombre. Le film succède dans l’œuvre de la cinéaste à Sans queue ni tête, tourné sept ans plus tôt. Il ne serait pas étonnant que ce changement d’orientation thématique soit la traduction d’un changement de regard personnel et durable sur le monde

Camille vit dans une mission catholique au Cambodge de nos jours, elle envisage de prendre le voile. Tous les jours elle emprunte un chemin qui longe une rivière et les ruines de temples, pour soigner une villageoise. Elle va croiser Sambath, guide touristique qui part à la ...